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  1. 2009/02/26
    Simone Weil (1909~43) [2/3일, 탄생 100주년]
    tnffo
  2. 2009/02/26
    Simone Weil, 100 ans (텍스트 듣기)
    tnffo
  3. 2009/02/26
    Albert Camus, philosophe (+audio)
    tnffo

Simone Weil (1909~43) [2/3일, 탄생 100주년]

오늘자 르몽드(그러니까 르몽드는 석간이므로 2/27일자 종이신문에 실릴)에서 시몬 베이여*(Simone Weil) 특집판을 만들었다는 소식을 듣고 관련기사 3개를 모두 옮겨온다 (르몽드는 이렇게 퍼다두지 않으면 나중에 기사가 유료창고로 가버려 돈주고 사야만 되는 불상사가 생김).

첫번째 기사는 프레데릭 봄스(Frederic Worms)라는 베르크손*과 현대철학에서 상당히 촉망받는 젊은 철학자와의 인터뷰인데, 여기서 그는 왜 시몬 베이여의 철학이 "필연성의 철학"인지 등을 설명한다 ; 두번째 기사는 지난 2월 3일이 시몬 베이여 탄생 100주년이었던 모양이고, 그래서 작년 이래로 많은 기념 출판물이 나왔다는 등의 출판 관련 소갯글 ; 세번째 기사는 그녀의 철학 만큼이나 난해한 삶(전기)에 대한 얘기로, 시몬 베이여는  레비나스(E.Levinas,1905~95), 사르트르(J.-P.Sartre,1905~80), 마담 보부와(S.de Beauvoir,1908~86), 까뮈(A.Camus,1913~60) 등과 비슷한 나이였지만 34세에 결핵으로 일찍 세상을 등지는 바람에 진가가 덜 알려진 경우, 그러나 그녀가 그 짧은 시간에 담아낸 세상과 사회와 철학에 대한 깊이와 정성은 감히 보부와 같은 부르조아 마담에게는 두렵거나 놀라운 충격이었다는데... (아마 마담 보부와와는 ENS동기일 듯). 

 

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1 - Entretien "Une philosophie de la nécessité"

LE MONDE DES LIVRES | 26 février 2009 | Propos recueillis par Nicolas Weill | 605 mots

2 - Enquête Simone Weil, philosophe avant tout

LE MONDE DES LIVRES | 26 février 2009 | Nicolas Weill | 1150 mots

3 - Un défi pour ses biographes

LE MONDE DES LIVRES | 26 février 2009 | Nicolas Weill | 345 mots

 


1/3. Une philosophie de la nécessité (LE MONDE DES LIVRES | 26.02.09 | 10h11)

Frédéric Worms est professeur à l'université Lille-III et directeur du Centre international d'étude de la philosophie française. Entretien. 

 

Pourquoi peine-t-on à prendre Simone Weil pour une philosophe ?

Pour comprendre les idées, les pratiques et même la vie qui ont donné lieu à tant de ces jugements fascinés ou ironiques, il faut aller directement à la philosophie de Simone Weil, et même directement en son centre, qui est une philosophie de l'expérience de la nécessité. La philosophie a aussi pour rôle d'exprimer par les mots les plus "purs" cette expérience que font tous les hommes sous des formes extrêmes et opposées entre elles : vérité et justice, mais aussi force et malheur. Ainsi, la philosophie a ce rôle central : reconnaître ces expériences et ces expressions, critiquer ce qui nous en sépare et nous mutile. C'est donc là une grande philosophie, à la fois en elle-même et en ce qu'elle conduit au-delà de la philosophie.

[번역] 우리가 시몬 베이여를 철학자로 이해하려 애써야할 이유는 무엇인가? / 시몬 베이여의 생각과 실천 그리고 역시 인생 까지를 이해하기 위해서는 바로 그녀의 철학으로, 그리고 바로 그녀의 중심으로 가야한다. 그녀의 생각-실천-인생이 (세상에 대해) 매혹되거나 야유를 보내는 판단들을 낳았다면, 그녀의 중심(핵심)이란 필연성의 경험에 대한 어떤 철학이다. 철학이란 이런 필연성의 경험을 가장 순수한 단어로 표현하는 역할을 하는데, 그 경험은 사람에 따라 각기 다른 단어들의 극단적이고 상반된 형태로 나타난다: 진리와 정의, 마찬가지로 힘(능력-권력)과 불행 등. 그렇게 철학은 이런 중심 역할을 한다: 필연성의 경험과 표현을 인식하고, 그것들로부터 분리되고 단절된 무엇을 비판하는 것 말이다. 바로 여기에 시몬 베이여의 큰 철학이 있는데, 그것은 동시에 철학 속에서 그리고 그녀가 철학 너머로 이끈 무언가의 속에 있다.

[사족] 필연성이 진리의 다른 표현이라면, 그녀의 진리란 내 이웃의 불행(malheur)에 애정과 관심(attention)을 갖는 것이지 외면할 권리가 아니라는 대강으로 통할 듯하다. 그런데 이러한 입장은 종교적 도덕성에 기반한 것이 아니라 불행(불의-불평등-비참)이 갖는 극복(타파)해야 할 대상으로서의 필연성에의 천착이고, 이것이 바로 시몬 베이여의 철학이 아닐까 싶다.]

 

Peut-on comparer son itinéraire à celui d'Henri Bergson ?

S'il s'agit de leur commun passage, qui ne fut pas une conversion, du judaïsme au christianisme, tout, ici aussi, les oppose et les relie : du côté de Bergson, les paroles de l'Evangile dépassent infiniment les appels des prophètes à la justice, mais elles les prolongent aussi, dans le sens de la morale "ouverte" ; du côté de Simone Weil, l'amour mais aussi la Croix du Christ la conduisent à un refus lui-même violent d'un Ancien Testament réduit au Dieu violent "des armées". Mais on comprend aussi que, sur ce point comme sur d'autres, ces relations et ces ruptures sont plus subtiles et importantes qu'on ne croit. De fait, l'un et l'autre opposent finalement deux attitudes religieuses, et dans chaque religion, avec comme critère l'orientation vers la justice contre toute fermeture sur soi.  

 

Qu'est-ce qui relève chez elle des courants philosophiques français de son temps ?

Elle retient ce qui nous met en contact direct avec la nécessité, et critique ce qui s'intercale entre nous et ces expériences pures. Ainsi, Alain l'a introduite à la nécessité chez Spinoza ou Platon, ou encore dans l'action et l'art, mais il reste un penseur du "jugement" qu'il faut dépasser ; de même le "personnalisme" ou les "droits de l'homme" intercalent selon elle des entités fictives entre l'homme et le "sacré" ou entre l'homme et les "obligations", qui, selon L'Enracinement, nous sont immédiatement et éternellement imposées.  La science - y compris les mathématiques - n'est jamais seulement théorique, elle nous met en contact avec une nécessité égale pour tous, et la beauté de l'univers. A fortiori la connaissance du social doit en découvrir les mécanismes - et notamment celui de "l'oppression", ce qu'a fait Marx selon Simone Weil. Bien sûr pour le transformer, même si sa conception de la nécessité rend cela difficile. 

 

Quel est le legs de cette pensée ?

On ne mesure pas le degré de son influence après la guerre. Il y eut des fascinations - hagiographiques ou hypercritiques ; mais elle permit un double maintien de l'Absolu dans l'existence même, sous une forme critique d'abord (des mythes, des propagandes), pensée et vécue ensuite. Dans Europe 51, de Roberto Rossellini, explicitement inspiré par Simone Weil, Ingrid Bergman est conduite par le malheur à dépasser les illusions d'un monde qui veut l'enfermer comme folle, alors même que l'action qui en découle pour elle lui révèle le croisement "surnaturel" du malheur et de la joie. Car telle est la leçon paradoxale de Simone Weil, que les cris les plus secrets qui nous sont arrachés communiquent tous en un point. Il ne s'agit de s'en faire ni le disciple ni le juge, mais de la comprendre pour accéder à ce qui, pour chacun de nous, en accord ou en écart avec une telle philosophie, est un tel point, qui est le point même en chacun de la philosophie. (Propos recueillis par Nicolas Weill / Article paru dans l'édition du 27.02.09.)

 

 

2/3. Simone Weil, philosophe avant tout (LE MONDE DES LIVRES | 26.02.09 | 10h11)

 

On l'aura voulue mystique, sainte laïque ou sainte tout court, toquée, anorexique... On aura brocardé, de son vivant même, sa mise déjantée, son éternelle pèlerine, ses énormes lunettes, sa laideur étudiée, ses cheveux de cocker, sa maladresse proverbiale ou son ton péremptoire. Aucun des stigmates habituels par lesquels on cherche à ridiculiser une femme qui pense n'aura été épargné à Simone Weil, elle qui pourtant ne se voulait pas "féministe" ; elle dont l'oeuvre restera pour l'essentiel posthume, recomposée en aphorismes par ses amis catholiques, comme Gustave Thibon (La Pesanteur et la Grâce) ou restituée par l'intérêt que lui vouera Albert Camus (qui publie L'Enracinement, rédigé peu de temps avant sa mort). 

D'elle on ne retient souvent que le séjour de la normalienne agrégée d'origine bourgeoise à l'usine, l'engagement aux côtés des républicains espagnols, la conversion inachevée au catholicisme, parallèle au rejet opiniâtre du judaïsme. Mais les exercices d'admiration ou de détestation qu'elle suscite manquent souvent l'essentiel : le fait que Simone Weil, qui aurait eu 100 ans le 3 février, a été d'abord une philosophe avide de cohérence, dans sa vie comme dans ses écrits. L'un des plus importants philosophes français du XXe siècle sans doute, si son existence n'avait pas été fauchée à 34 ans, au sein de la France libre qu'elle avait ralliée, comme son ami l'épistémologue et résistant Jean Cavaillès. Tuberculeuse, elle s'éteint le 24 août 1943 dans un hôpital londonien sous le coup des privations qu'elle s'était imposées par esprit de solidarité avec les restrictions dont la population française était victime. 

La publication, à l'été 2008, du quatrième tome de ses oeuvres complètes sous le titre d'Ecrits de Marseille est l'occasion de découvrir le penseur qu'elle a été d'abord. Ces textes concernent la période au cours de laquelle, de 1940 à l'exil à New York puis en Angleterre en 1942, elle réside avec ses parents dans le sud de la France, dans l'attente d'un départ dont elle espère qu'il lui permettra de rejoindre enfin le combat contre l'Axe. A première vue, rien de moins philosophique que cette séquence marquée avant tout par une aspiration déçue à l'action et par l'élaboration d'un suicidaire projet d'"infirmière de première ligne", qu'elle s'obstinera en vain à faire adopter par Londres et qui préfigure l'engagement humanitaire. L'heure semble vouée à l'approfondissement d'une quête religieuse commencée depuis les années 1930, qui la conduit "au seuil de l'Eglise" - un seuil qu'elle ne franchira pas, de son fait et à cause de la réticence de ses interlocuteurs chrétiens, déconcertés par cette catéchumène hors normes. C'est à ce moment qu'elle fait également la rude expérience de la ferme et des vendanges à Saint-Julien-de-Peyrolas (elle se récite le Notre Père en grec pour se donner du courage). En outre, encouragée par sa fréquentation du poète René Daumal, elle se passionne pour ce qu'elle juge être les sources non chrétiennes, platonicienne mais aussi orientale, du christianisme (le taoïsme, la Bhagavad-Gîtâ et les Upanishad). Dans le même temps, elle s'intéresse de près à l'histoire des sciences qui lui sont immédiatement contemporaines (la physique de Max Planck). 

 

LE TRAVAIL, RÉFÉRENCE ULTIME 

De cette exceptionnelle floraison entre fuite et émigration, trois des ouvrages suscités par la perspective du centenaire se font l'écho ou le commentaire. Chacun a le mérite de scruter ce qui pourrait constituer l'unité d'une production intellectuelle si disparate à première vue. Une production que les nécessités de l'heure et la relégation imposée par les lois raciales à celle qui rejette, jusqu'à la fin et de toutes ses forces, un judaïsme dont elle est familialement issue, laisseront irrémédiablement à l'état d'ébauches. On n'en sent pas moins apparaître un fil conducteur de plus en plus insistant dans cette pensée qu'il devient presque possible, grâce à la philosophe et traductrice Sylvie Courtine-Denamy, à Robert Chenavier, qui dirige les Cahiers Simone-Weil, et aux auteurs rassemblés dans le très éclairant collectif dirigé par Florence de Lussy, de reconstituer - pourquoi pas ? - en système. 

Textes originaux et littérature secondaire aboutissent en effet à mettre au centre de cette pensée la notion de travail. Celle-ci joue le rôle de référence ultime que remplit par exemple "le monde de la vie" dans la philosophie tardive d'Husserl. Elle comme lui s'inquiètent du cours des sciences modernes, qui s'affranchissent de plus des limites de la perception. Le travail représente pour Simone Weil l'expérience humaine formatrice de notre rapport au réel. C'est en ce sens, et en ce sens seulement, que l'on peut la considérer comme une "matérialiste". Chez elle comme chez Marx, qu'elle a lu très tôt, la matière ne renvoie pas à un donné inerte, mais est d'abord le résultat de l'élaboration humaine. C'est le travail qui introduit de l'unité et de la continuité dans l'univers. Or l'une et l'autre sont menacées par l'évolution scientifique ainsi que par le machinisme et la technique, dont Simone Weil a, très concrètement, bien avant les prêtres-ouvriers ou les maoïstes "établis", éprouvé dans sa chair la violence, à l'usine en 1934 et 1935. 

Pourtant, paradoxalement, le travail - celui du manoeuvre précise-t-elle - incarne également l'obéissance consentie à la nécessité et la douleur. Il est donc l'indice le plus certain de notre participation à la création. Non que cette incessante révoltée ait prêché la moindre résignation à une condition vouée au malheur qui transforme, selon elle, la personnalité en chose. Mais parce que le malheur, qui cloue l'être comme le papillon sur la planche de l'entomologiste, constitue la modalité de la rencontre avec un ici-bas dont elle pense que Dieu s'est retiré pour le créer. Pour être à la mesure de cette absence que la Croix symbolise, l'homme doit en passer, lui aussi, par la souffrance et l'esclavage. Il doit se soumettre à la "décréation" et s'absenter le plus possible du monde. Ce que les mystiques désignent comme la kénosis ("vide" en grec), devient chez Simone Weil le mode privilégié de notre relation à Dieu, l'expression adaptée de notre vie religieuse. La sainteté pour un chrétien est le minimum qu'on puisse attendre, ira-t-elle jusqu'à affirmer. Nul masochisme donc, mais une démarche dont la logique transparaît dans ses écrits ; l'édification d'une constellation dont les éléments se répondent, puisant autant à la mystique rhénane d'un Maître Eckhart qu'à Homère. Dans son Iliade ou le poème de la force (1940-1941), Simone Weil loue l'aède qui chante la guerre sans prendre parti. La beauté de l'horreur devient objet d'amour dans le poème en laissant entrevoir, derrière la nécessité brutale, l'idée d'un ordre

La marche asymptotique de Simone Weil vers le catholicisme ne s'accompagne d'aucun renoncement à la raison. Dans cet agencement de la foi et du savoir à l'ère moderne - question à laquelle elle aura tenté de répondre -, réside l'un des intérêts principaux de cette oeuvre. Ce qui ne meurt. 

ŒUVRES COMPLÈTES, TOME IV. ECRITS DE MARSEILLE (1940-1942) de Simone Weil. Edition publiée sous la direction de Florence de Lussy. Gallimard, 608 p., 35 €.

SIMONE WEIL. LA QUÊTE DE RACINES CÉLESTES de Sylvie Courtine-Denamy. Cerf, "La nuit surveillée", 154 p., 18 €.
SIMONE WEIL. L'ATTENTION AU RÉEL de Robert Chenavier. Michalon, "Le bien commun", 126 p. , 10 €.

SIMONE WEIL. SAGESSE ET GRÂCE VIOLENTE sous la direction de Florence de Lussy. Bayard, 318 p., 25,50 €.

(Nicolas Weill / Article paru dans l'édition du 27.02.09.)

 

 

3/3. Un défi pour ses biographes (LE MONDE DES LIVRES | 26.02.09 | 10h11)

Comment parler de Simone Weil ?, s'est demandé un jour Emmanuel Levinas(1905~1995), lui reprochant, dans Difficile liberté, l'extrême dureté avec laquelle elle s'était attaquée au judaïsme. Dans l'attente d'une nouvelle "vie" de Simone Weil qui s'ajoutera à la célèbre biographie de son amie Simone Pétrement (La Vie de Simone Weil, Fayard, 1997), on se contentera des livraisons, fragmentaires ou subjectives, occasionnées par le centenaire. L'existence de la philosophe pose, il est vrai, un redoutable défi à ses biographes tant sa brièveté est proportionnellement inverse aux événements dont elle a été remplie. 

Fille de médecin, née à Paris en 1909 dans une famille juive et agnostique, Simone Weil suit à première vue le cursus honorum classique de la bourgeoisie éclairée de son temps - normalienne, agrégée de philosophie -, n'eût été son militantisme d'extrême gauche acharné et un souci exacerbé de la misère du monde qui laissera pantoise sa condisciple Simone de Beauvoir(1908~1986). Elle s'expose volontairement à la violence de son temps, en usine d'abord, puis en Espagne, où elle s'engage dans le camp républicain, avant d'entrer en résistance contre l'occupant allemand. 

Le ton parfois hagiographique adopté aussi bien par Christiane Rancé que Laure Adler ou les poètes Christine Rabedon et Jean-Luc Sigaux laisse pourtant une impression d'insatisfaction, même si tous ces ouvrages apportent des précisions intéressantes sur tel ou tel point. En effet, ils donnent tous l'impression que Simone Weil et son oeuvre ont encore besoin d'être défendus. Contre quoi ? Elle-même a su de son vivant rectifier ou regretter certaines erreurs de jugement (son pacifisme obstiné d'avant-guerre, par exemple). En revanche, son anticolonialisme farouche reste a posteriori lucide. Sans doute l'aspect fragmentaire de son oeuvre a facilité toutes les réappropriations, dévotes, politiques et autres. Mais plus qu'en "sainte", c'est sans doute en intellectuelle engagée de son temps qu'elle nous parle encore le mieux.  

L'Insoumise. Simone Weil, de Laure Adler (Actes Sud, 278 p., 20 €) ;

Simone Weil, de Christiane Rancé (Seuil, 256 p., 18 €) ;

Simone Weil. Mystique et rebelle, de Christine Rabedon et Jean-Luc Sigaux (L'Entrelacs, 256 p., 16 €) ;

Simone Weil. Le ravissement de la raison, textes choisis et présentés par Stéphane Barsacq (Points, 94 p., 5 €).

(Nicolas Weill / Article paru dans l'édition du 27.02.09.)

 

*시몬 베이여(Simone Weil)는 예외적으로 사전에 발음기호가 병기된 경우인데, [wej] 라고 돼 있으니 베유-베이유-베일 등이 아니라 '베이여' 정도로 읽어야겠다. 그리고 인터뷰기사에서 언급되는 베르크손(H. Bergson)도 같은 경우로, 사전에 [berkson]으로 돼 있으니 '베르그송'이 아니다. 참고로 이 인터뷰 기사의 주인인 프레데릭 봄스(F. Worms) 라는 젊은 사람은 프랑스 최고의 베르크손 전문가인데, 릴3대학과 ENS에서 주로 활동한다 함.

 

 

[부록] De l’expérience mystique à l’engagement progressiste

저작 마지막권(08-05-22 간)에 대한 서평 (l'Humanite, Tribune libre - Article paru le 18 décembre 2008 idées)

 Oeuvres complètes : Tome 4, Volume 1, Ecrits de Marseille (1940-1942)Écrits de Marseille, 1940-1942. OEuvres complètes, de Simone Weil

(tome IV, volume I), publiées sous la direction d’André Devaux et Florence de Lussy. Éd. Gallimard, 2008, 622 p.

 

Que sait-on aujourd’hui de cette philosophe militante née à Paris le 3 février 1909 et morte de la tuberculose à Ashford, dans le Kent, le 24 août 1943 ? On ne comprendra pas grand-chose à sa biographie si l’on ne saisit pas le fil conducteur de sa courte existence : « vivre avec ». Avec Dieu, avec le syndicalisme révolutionnaire, avec son idéal libertaire… et pas seulement vivre la souffrance concrète causée par l’exploitation. L’oeuvre de Simone Weil est immense, source de multiples contresens logiques. C’est pourquoi elle a pu faire peur à certains de ses condisciples néopositivistes.

La pesanteur et la grâce (1) sont si rarement réunies en une seule et même personne ! À l’École normale supérieure, on préférait se moquer d’elle pour cacher l’espèce de terreur qu’inspiraient l’étendue de son savoir et sa vivacité d’esprit. D’origine juive, elle s’est finalement tournée vers le christianisme après avoir milité dans divers mouvements libertaires. Cette jeune fille d’origine bourgeoise désirait participer à la « condition ouvrière » de l’intérieur. Ce sera le titre de son ouvrage le plus connu. Elle s’engage encore plus totalement durant ses vacances d’été à vingt ans et travaille dans les champs à Marnoz, dans le Jura. Un an plus tard, elle obtient son diplôme d’études supérieures en philosophie. Seule jeune fille de sa promotion, elle est reçue sixième à l’École normale supérieure. Reçue septième à l’agrégation en 1931, elle connaîtra à plusieurs reprises l’épreuve de la sous-alimentation. Elle fut ouvrière chez Renault en 1934-1935 puis s’engagea dans les Brigades internationales lors de la guerre d’Espagne. Elle quitta la France en 1942 pour New York puis pour Londres où elle travailla dans les bureaux de la France combattante.

Son « désir le plus ardent » était de subir « autant de souffrances et de dangers que ceux qui en subissent le plus ». C’est dans cet état d’esprit qu’elle demanda en vain à la France libre de Londres d’être parachutée sur le territoire français pour participer à la résistance intérieure. Les Écrits de Marseille confirment ce qu’on pourrait appeler la thèse de « l’expérience mystique ». Aussi, aucun lecteur de cet ouvrage ne s’étonnera de la séduction grandissante qu’exerçait sur elle un certain spiritualisme dont même Henri Bergson se défendait. La question de la conversion de Simone Weil reste l’objet de polémiques. Elle se convertit au catholicisme, selon Georges Hourdin (Simone Weil, Éditions La Découverte, 1989), à la veille de mourir d’une tuberculose, après avoir refusé de se nourrir et de se soigner. D’autres doxographes prétendent que l’épisode demeure incertain. Elle disparaît à trente-quatre ans, philosophe d’inspiration chrétienne, solidaire de ses origines juives, après avoir épousé le syndicalisme  révolutionnaire et l’idéal libertaire. C’est précisément cette pensée en colimaçon qui fait sa force et son oecuménisme. « L’expérience mystique » peut parfois générer une pensée plutôt progressiste. Pour elle, « la pensée de malheurs ou de dangers auxquels je n’ai pas pris part me remplit d’un mélange d’horreur, de pitié, de honte et de remords qui m’ôte toute liberté d’esprit ; la perception de la réalité me délivre de tout ça ». S’il est une pensée qui s’est constituée à partir de ce que son auteure a vécu et éprouvé en cherchant des solutions à des problèmes qui lui paraissaient être ceux de son époque : la misère, l’inégalité, et surtout l’humiliation des faibles à l’usine et des colonisés, c’est bien la sienne. (Arnaud Spire)

(1) Titre d’un de ses livres (Éditions Plon, 1947).

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Simone Weil, 100 ans (텍스트 듣기)

Il y a tout juste 100 ans, le 3 février 1909, naissait Simone Weil. Pour donner toute sa place à cette philosophe française en quête d’absolu, Canal Académie propose une série de quatre émissions animées par Virginia Crespeau. Voici la première, consacrée au personnage historique de Simone Weil, telle qu’elle sera portée à l’écran par la cinéaste Emanuela Piovano, incarnée par la comédienne Lara Guirao, et racontée par sa nièce Sylvie Weil.
Née à Paris en 1909 dans une famille juive non pratiquante, Simone Weil étudie au lycée Henri IV avec le philosophe Alain. Suivant le modèle de son frère, brillant mathématicien, elle entre à l’Ecole normale supérieure et passe son agrégation de philosophie en 1931. Elle enseigne ensuite au Puy, à Roanne et à Saint-Étienne, où elle se rapproche de la classe ouvrière. Elle écrit ses premiers essais ( Oppression et liberté) en confrontant sa conception du marxisme avec la réalité du travail qu’elle expérimente ensuite dans les usines Alsthom et Renault. Toujours en quête d’absolu, Simone Weil rejoint le Front républicain espagnol en 1936 et connaît sa première révélation mystique à l’abbaye de Solesmes, deux ans plus tard. Dès lors, elle veut comprendre la volonté de Dieu et l’articuler intellectuellement avec ses propres expériences religieuses. Elle donne dans Pensées sans ordre concernant l’amour de Dieu une interprétation mystique de la religion chrétienne, pleine de son désir de sacrifice. En 1942, forcée de se réfugier aux Etats-Unis, Simone Weil refuse de quitter ses compatriotes et revient aider les Forces françaises libres en Angleterre. Atteinte de tuberculose, elle s’éteint à 34 ans dans un sanatorium anglais à Ashford le 24 août 1943.

 

1/ Simone Weil : sa vie bientôt portée à l’écran (1/4) [시몬 베이여의 삶이 곧 영화로 나온다는...]
http://www.canalacademie.com/Simone-Weil-le-regard-du-cinema.html (le 01/03/2009)
avec la cinéaste Emanuela Piovano, la comédienne Lara Guirao, et Sylvie Weil [대담자]

2/ Simone Weil : moments d’une vie intense (2/4) [열정으로 보낸 압축된 짧은 삶 34년...]
http://www.canalacademie.com/Simone-Weil-elements-d-une-vie.html (le 01/03/2009)
avec Laure Adler, Sylvie Courtine Denamy, Sylvie Weil [대담자]

3/ Parcours et oeuvres de la philosophe Simone Weil (3/4) [개괄과 저작]
http://www.canalacademie.com/Simone-Weil-3-4.html (le 08 mars 2009)
avec Florence de Lussy, Sylvie Courtine-Denamy, Bertrand Saint-Sernin

 

4/ La vie et la grève des ouvriers en 36, une expérience de la philosophe Simone Weil (4/4) [텍스트 듣기]
http://www.canalacademie.com/La-vie-et-la-greve-des-ouvriers-en.html (le 22 mars 2009)
Lectures d’extraits de textes de Simone Weil, par Lara Guirao
Simone Weil a voulu se faire ouvrière, en 1936. Elle a raconté par écrit son expérience en usine, une vie pénible, physiquement et moralement. Lara Guirao, comédienne française qui interpréte au cinéma le personnage de Simone Weil, nous fait lecture des passages qui l’ont le plus touchée.



Emission proposée par : Virginia Crespeau, 22 mars 2009

Cette lecture a été enregistrée en février 2009 alors que le film sur Simone Weil est en finition de montage et sortira prochainement sur les écrans français. La réalisatrice en est l’italienne Emanuela Piovano.

"Commander ne rend pas facile de se mettre à la place de ceux qui obéissent. Rien ne paralyse plus la pensée que le sentiment d’infériorité nécessairement imposé par les atteintes quotidiennes de la pauvreté, de la subordination, de la dépendance. La première chose pour eux, c’est d’arriver à retrouver ou à conserver selon le cas le sentiment de leur dignité. Je ne sais que trop combien il est difficile dans une pareille situation de conserver ce sentiment, combien tout appui moral peut être alors précieux.

J’espérais de tout mon cœur pouvoir par ma collaboration à votre journal apporter un petit peu d’un tel appui aux ouvriers de Rosières… Pour les malheureux, leur infériorité sociale est infiniment plus lourde à porter du fait qu’ils la trouvent présentée partout comme quelque chose qui va de soi…

Laure Adler, <i>L'insoumise</i>
Laure Adler, L’insoumise

C’est ma première journée dans cette usine ; elle m’avait paru accueillante la veille, après toute un journée passée à arpenter les rues, à présenter des certificats inutiles, enfin ce bureau d’embauche avait bien voulu de moi ; comment se défendre au premier instant d’un sentiment de reconnaissance…

Me voici sur une machine. Compter 50 pièces, les placer une à une sur la machine, d’un côté pas de l’autre, manier à chaque fois un levier, ôter la pièce, en mettre une autre, encore une autre, compter encore, je ne vais pas assez vite, la fatigue se fait déjà sentir, il faut forcer, empêcher qu’un instant d’arrêt ne sépare un mouvement du mouvement suivant, plus vite, encore plus vite. Allons bon, voilà une pièce que j’ai mise du mauvais côté -qui sait si c’est la première, il faut faire attention, cette pièce est bien placée, celle-là aussi, combien est-ce que j’en ai fait ces 10 dernières minutes ? Je ne vais pas assez vite, je force encore, peu à peu la monotonie de la tache m’entraine à rêver, pendant quelques instants je pense à bien des choses, réveil brusque, combien est-ce que j’en ai fait ? Ca ne doit pas être assez, faut pas rêver, forcer encore, si seulement je savais combien il faut en faire, je regarde autour de moi, personne ne lève la tête, jamais, personne ne sourit, personne ne dit un mot, comme on est seul ! je fais 400 pièces à l’heure, savoir si c’est assez, pourvu que je tienne à cette cadence au moins ; la sonnerie de midi enfin, tout le monde se précipite à la pendule de pointage au vestiaire hors de l’usine, il faut aller manger, j’ai encore un peu d’argent heureusement, mais il faut faire attention, qui sait si on va me garder ici. Je ne chômerai pas encore des jours et des jours. Il faut aller dans un de ces restaurants sordides qui entourent les usines, ils sont chers d’ailleurs, certains plats sont assez tentants, mais ce sont d’autres qu’il faut choisir, les meilleurs marché, manger coûte un effort encore. Ce repas n’est pas une détente. Quelle heure est-il ? Il reste quelques moments pour flâner mais sans s’écarter trop. Pointer une minute en retard, c’est travailler une heure sans salaire… l’heure avance, il faut rentrer. Voici ma machine, voici mes pièces, il faut recommencer, aller vite, je me sens défaillir de fatigue et d’écoeurement, quelle heure est-il ? Encore deux heures avant la sortie, comment est-ce que je vais tenir ? Voilà que le contremaître s’approche : « combien en faites-vous ? » « Quatre cents à l’heure » « il en faut huit cents, sans quoi je ne vous garderai pas, si à partir de demain vous en faites huit cents, je consentirai peut-être à vous garder ». Il parle sans élever la voix, pourquoi élèverait-il la voix quand d’un mot il peut provoquer tant d’angoisses, que répondre, « je tâcherai ». Forcer, forcer encore, vaincre à chaque seconde ce dégoût, cet écoeurement qui paralyse, plus vite, il s’agit de doubler la cadence. Combien en ai-je fait ? Au bout d’une heure six cents, plus vite. Combien au bout de cette dernière heure six cent cinquante. La sonnerie, pointer, s’habiller, sortir de l’usine, le corps vidé de toute énergie vitale, l’esprit vide de pensées, le cœur submergé de dégoût, de rage muette, et par-dessus tout cela d’un sentiment d’impuissance et de soumission car le seul espoir pour le lendemain c’est qu’on veuille bien me laisser passer encore une pareille journée… Il s’agit après avoir toujours plié, tout subi, tout encaissé en silence pendant des mois et des années, d’oser enfin se redresser, se tenir debout, prendre la parole à son tour, se sentir des hommes pendant quelques jours, indépendants des revendications. Cette grève est en elle-même une joie, une joie pure, une joie sans mélange, oui une joie.

 

© collections privées de Lara Guirao: http://filmoguirao.chez.com/index.htm

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Albert Camus, philosophe (+audio)

Albert Camus : une pensée pertinente pour aujourd’hui

Regard sur la philosophie, la chronique de Damien Le Guay

A l’occasion de la publication des deux derniers tomes de son œuvre complète, dans la collection La Pléiade, il nous a semblé nécessaire de rendre hommage à Albert Camus dont la pensée, si juste en son temps, reste pertinente aujourd’hui. Damien Le Guay lui consacre sa chronique.
Emission proposée par : Damien Le Guay
Référence : CHR521
Adresse de cet article : http://www.canalacademie.com/Albert-Camus-est-toujours-vivant.html
Date de mise en ligne : 8 mars 2009

Partons de cette phrase d’Albert Camus, en 1956, quand il rend hommage à Salvador de Madariaga, intellectuel espagnol parti en exil après l’arrivée au pouvoir de Franco : « Ceux qui se sentent faits d’abord pour admirer et pour aimer, et qui, dans le désert du monde contemporain, risquaient de périr de faim et de soif, ont une dette de reconnaissance infinie envers tous ceux qui, en des temps déshonorés, leur ont offert une image digne et fière de l’homme et de l’intellectuel ». Cette phrase s’applique à Albert Camus lui-même, mort jeune dans un accident de la route le 4 janvier 1960 à l’âge de quarante six ans, encore auréolé de son prix Nobel reçu deux ans auparavant.

Rejeté par des intellectuels médusés par le communisme

Dans les années 1950, il fut l’honneur des intellectuels (de gauche) qui, en masse, s’étaient embrigadés dans le glacial parti de la justice meurtrière. Quand il « fallait » prendre le train de l’Histoire, et « justifier » ainsi, les Goulags « nécessaires », lui, Albert Camus, dénonçait les « bouchers de la vérité » et ce « socialisme des potences ». Quand eux mentaient pour « la bonne cause » et disaient « que le ciel est bleu quand il est gris », lui les accusait de prostituer les mots. Quand tout ce beau monde mettaient de l’essence marxiste dans le moteur de l’histoire pour le faire tourner à plein régime (régime aussi concentrationnaire), lui, l’enfant d’Alger d’origine modeste, répétait sa conviction jugée hérétique : « Aucun des maux auxquels prétend remédier le totalitarisme n’est pire que le totalitarisme lui-même. ». Il fut rejeté par la gauche inoxydable. Fut vomi pour sa tiédeur. Dénonçait ce qui pollue les idées généreuses : le cynisme, les compromissions, le conformisme des moutons – ou plutôt des loups. Il rejetait la haine et mettait en avant son contraire qui, dit-il, n’est pas « l’idéalisme timide mais la justice généreuse »

Une oeuvre sans aucune ride

Mais cette œuvre, si juste en son temps, soucieuse d’éviter les emportements furieux et embrigadements soit disant « nécessaires », n’est-elle pas un peu datée ? Le vent de la liberté, celui qui fit tomber le mur de Berlin, ne l’a-t-il pas emportée ? Il n’en est rien. Les deux derniers volumes de ses œuvres complètes en Pléiade, qui viennent de paraître, et vont de 1949 jusqu’à sa mort, en donne la preuve. Albert Camus, dans son théâtre et ses romans, restitue la complexité du monde, les mille nuances de la pensée, l’épaisseur des sentiments humains. Pour lui, il faut à la fois consentir à la beauté et refuser la cruauté et les injustices du monde. Il faut tenir les deux. N’être ni en retrait du monde ni embrigadé par l’époque. Ni pour un art désincarné ni pour un art ancillaire – au service d’une Cause.

L’amitié et l’honneur selon Camus

Camus était homme d’amitié. C’est ainsi qu’il fut proche de René Char et fit découvrir les œuvres de la philosophe Simone Weil. Mais surtout il sait ne pas être seul. Quand il reçoit le prix Nobel, il écrit aussitôt à Louis Germain, son ancien instituteur – qui avait persuadé tout le monde que le petit Albert devait poursuivre ses études - : « Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j’étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé. » Camus est homme d’honneur. Il honore ses dettes. Sait que le monde est fragile et qu’il peut à tout moment se défaire, se disloquer en mille morceaux. (Texte de Damien Le Guay)

 


 

빠리고등사범학교에서 2007년 3월에 있었던 까뮈에 대한 꼴로끄(학술대회)의 불어 요약본이다. 구체적인 내용은 안 나오고 간략한 몇 줄짜리의 문제재기 차원이다. '까뮈 철학(혹은 문학)에서 뭐가 문제인지' 정도의 흐름이나 살펴보는 것으로 만족해야겠다. 발표자들은 모르는 사람이 대부분인데, 그 중에서 주목할 사람은 프레데릭 봄스(Frédéric Worms)라는 릴3대학 교수이며 프랑스 최고의 베르크손(Bergson) 전문가라고 함. 다음의 주소로 가면 꼴로끄 동영상이 나옴: http://www.diffusion.ens.fr/index.php?res=conf&idconf=1807

 

Colloque Albert Camus : littérature, morale, philosophie
Organisé par : Jean-Charles Darmon (univ. Versailles/Institut universitaire de France/ENS) et Lissa Lincoln (The American University of Paris) et Michel Murat (ENS) et Frédéric Worms (univ. Lille III, CIEPFC, ENS)

Colloque international et interdisciplinaire organisé par le Département littérature et langages et le Centre international d’étude de la philosophie française contemporaine (Département de philosophie) de l’École normale supérieure, avec le soutien du Programme « Littérature, Philosophie et morale » (ENS) et de l’American University of Paris.

 

Ressources en ligne
Introduction - Albert Camus : littérature, morale, philosophie (le 29 mars 2007) — Jean-Charles Darmon, Lissa Lincoln, Michel Murat et Frédéric Worms

A l’endroit la littérature, la philosophie à l’envers (le 29 mars 2007) — Kevin Newmark
La déclaration faite un jour par Camus « Je ne suis pas un philosophe » manifeste un certain agacement devant les multiples tentatives pour le situer par rapport à cette discipline. Il s’agit d’étudier les raisons de cette interrogation récurrente sur le statut de son œuvre. À partir de l’avis superficiel selon lequel Camus serait un « mauvais philosophe », il faut considérer les véritables sources d’une œuvre dans laquelle le rocher de Sisyphe, représentation de l’immense détresse de l’homme absurde, constitue l’envers d’une œuvre littéraire où la figure romanesque de l’Etranger devient une incarnation de la Différence.

Camus et Heidegger, les noces avec le monde (le 29 mars 2007) — Jean-François Mattéi
La condamnation par Sartre de « l’incompétence philosophique » de Camus manifeste son incompréhension d’une éthique où la générosité s’exprime au sens cartésien du terme, celui de l’estime de soi-même. Camus ne se comprend en effet que par ce fragile équilibre entre la vertu d’une volonté juste et le bonheur de l’estime de soi. Paradoxalement, on retrouve Camus lecteur de Hölderlin dans des œuvres philosophiques comme L’Envers et l’endroit, L’Homme révolté, Le Mythe de Sisyphe, tandis que des œuvres lyriques comme Noces à Tipasa sont influencées par sa lecture de Heidegger. Les deux approches fusionnent dans le sacré privé de joie de L’Eté.

La figure de l’innocent chez Camus (le 29 mars 2007) — Denis Salas
L’étude de la question du terrorisme telle qu’elle est traitée dans Les Justes par un Camus lecteur de Dostoïevski est celle d’une oscillation permanente entre le thème de l’innocence pure et celui de l’innocence pervertie. Le propos s’élargit dans L’Etranger, où l’on trouve simultanément un ordre menacé par la dissidence de Meursault et l’expression! d’une révolte contre la totalité des valeurs sociales.

La question de l’incroyance (le 29 mars 2007) — Carole Auroy-Mohn
Dans Le Premier Homme, Camus annonçait l’ouverture d’un troisième volet de son œuvre : le cycle de l’amour, après ceux de l’absurde et de la révolte. Le Premier Homme se constitue ainsi comme une nouvelle Genèse. Jacques Cormery, nouvel Adam, a cette particularité de s’avancer dans un univers sans créateur. Si Camus se déclarait d’une incroyance « passionnée », on est frappé pourtant par la perpétuelle résurgence de la question de Dieu, grand absent-présent du Premier Homme. La structure du manuscrit inachevé conduit Jacques Cormery à accepter la dérobade et l’oubli de l’origine, avant un ressourcement dans l’évocation de l’enfance.

Albert Camus, morale et littérature (le 30 mars 2007) — Michel Jarrety
Dans quelle mesure la morale que Camus a tenté de concevoir après Le Mythe de Sisyphe a-t-elle infléchi sa conception de littérature ? Dans quelle mesure cette conception a-t-elle pu se soumettre à une pensée morale ? Il faut partir de l’idée que Le Mythe de Sisyphe définit une morale personnelle, tandis que L’Homme révolté, dix ans plus tard, cherche à formuler une morale collective dont la clef de voûte est la notion de communauté. Il devient ensuite nécessaire de s’interroger sur la tâche assignée par Camus à la création littéraire, sur la nature de l’esprit de révolte, sur le double refus du réalisme comme des oeuvres dont la réalité est expulsée, et enfin d’étudier le rapport de Camus avec la poésie.

Chute libre et déclin du jugement (le 30 mars 2007) — Lissa Lincoln
Dans son oeuvre, Camus, loin de défendre tel ou tel système de valeurs, utilise le matériau littéraire pour mettre ces différents systèmes en tension. La « question du juste » (savoir ce qui est juste) y joue un rôle capital. Cette préoccupation se retrouve dans L’Étranger, La Peste, Les Justes et Caligula, et tout particulièrement dans La Chute, où le problème du jugement est évoqué par le monologue du personnage unique.

Camus et la revue Esprit (le 30 mars 2007) — Jean-Yves Guérin
Les relations entre Camus et la revue Esprit sont ici étudiées en détails. A un examen chronologique des rapports entre l’auteur et la revue avant et pendant l’Occupation est associé celui des comptes-rendus des œuvres de Camus faits par les rédacteurs d’Esprit (E.Mounier, A.Béguin, J.-M. Domenach), ainsi que l’étude des relations de Camus avec le Parti Communiste et les chrétiens de gauche.

Camus et Pascal : penser les limites (le 30 mars 2007) — Emanuel Germano

De L’Envers et l’endroit au Premier homme (le 30 mars 2007) — Pierre-Louis Rey
Il s’agit dans cette leçon d’étudier le lien entre L’Envers et l’Endroit et Le Premier Homme à la lumière des textes antérieurs qui s’y rattachent, ainsi qu’à celle de l’influence de Jean Grenier sur Camus. Le sentiment de sensibilité, déjà présent dans les Carnets, peut-il recevoir le nom d’amour dans ce roman symbolique de la condition humaine, qu’il est peut-être également pertinent de nommer « roman de la mère » ?

Le Premier homme : mémoire et manoeuvres intertextuelles (le 30 mars 2007) — Peter Dunwoodie
Cette leçon présente Le Premier Homme comme une litanie de la déshérence, qui ne laisse aucun doute sur le statut précaire de l’Européen en terre algérienne. Camus renverse la donne coloniale principalement à l’aide de deux œuvres (Le manuscrit d’Eugène François et À l’aube de l’Algérie française : le calvaire des colons de 48). L’intertextualité avec ces œuvres est étudiée au plus près pour mettre en lumière l’opposition entre travail de la mémoire et rôle de l’Histoire.

La peste comme analogie (le 30 mars 2007) — Michel Murat
Cette leçon s’attache à l’usage de l’allégorie dans La Peste de Camus. A partir de l’étude de quelques mots et notions, comme « fléau » ou « pestiféré », on s’interroge sur la portée et les limites de l’analogie, sur les identifications de sa teneur (« occupation » vs « nazisme »), ainsi que sur les effets produits par son intégration dans l’histoire d’une guerre qui pour Camus « n’est pas finie ». Ces effets expliquent l’écart entre l’accueil fait au livre par un public qui y trouvait une évocation crédible et émouvante de l’expérience commune, et sa réception critique par des lecteurs focalisés sur une mythologie de la Résistance, qui ne pouvaient accepter de l’identifier aux « formations sanitaires » qui la représentent dans le roman.

Le moment de Camus (le 30 mars 2007) — Frédéric Worms
A partir d’une question fondamentale sur la condition métaphysique de l’homme révolté (« l’absurde commande-t-il la mort ? ») cette leçon étudie, à un moment philosophique précis (celui de la deuxième guerre mondiale en France) à travers L’Homme révolté et les Lettres à un ami allemand, les trois tâches assignées par Camus à la philosophie : établir une métaphysique de l’Absurde, une morale de la Révolte, puis nous ramener à l’unité primitive masquée par l’absurde et la révolte. La dernière partie de la leçon met en évidence les trois types de pratique littéraire choisis par Camus pour traduire chacune de ces taches philosophiques.

 

Table ronde Albert Camus : littérature, morale, philosophie (le 30 mars 2007) — Jean-Charles Darmon
Organisateurs
Jean-Charles Darmon (univ. Versailles/Institut universitaire de France/ENS), directeur adjoint de l’École normale supérieure
Lissa Lincoln (The American University of Paris)
Michel Murat (ENS), directeur du Département de littérature et langages
Frédéric Worms (univ. Lille III, CIEPFC, ENS), Centre international d’étude de la philosophie française contemporaine, Ecole normale supérieure et université de Lille III

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