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낭시(J-L.Nancy) 인터뷰 & 'Q-R'기사 (09/6/2-Libé)

Liberation 02/06/2009 à 16h40

Jean-Luc Nancy: «Nous avons accès à la parole, il n'y a qu'à parler!»

Jean-Luc Nancy a écrit sur l'art, la politique, sur le coeur qui lui a été greffé il y a dix-huit ans, et sur Mai 68, proche de Derrida et de Philippe Lacoue-Labarthe, il est l'une des figures majeures de la philosophie contemporaine. Il a répondu à vos questions.

7 réactions

(Photo Patrick Swirc)

 

Frédéric. Que signifie pour vous le mot de communisme? Vous aviez donné votre accord pour participer à une conférence organisée par Alain Badiou et Slavoj Zizek, intitulée L'idée du communisme (Londres, 13-15 mars 2009). Vous avez malheureusement été empêché de venir. La condition mise à votre participation, que vous aviez donc acceptée, était que le mot de communisme peut et doit retrouver aujourd'hui une valeur positiive (cf. A. B., L'Hypothèse communiste, pp. 31-32). Quelle est cette valeur positive?

Jean-Luc Nancy. Je n'ai pas pu participer à la conférence de Londres parce que j'étais malade. J'ai écris un texte, une longue note, qui sera publié dans les actes du colloque de Londres. Je n'ai jamais mis de condition à ma participation, puisque venant de Badiou et Zizek, ils savaient très bien qu'il s'agissait de parler du communisme de façon positive. D'ailleurs, un jour, Badiou m'a qualifié de «dernier des communistes».

Pour moi, le communisme ça ne signifie pas un choix politique, encore moins un régime politique, ça signifie l'exigence, non seulement de nous permettre de vivre en commun, de mettre «le commun» en première ligne, avant l'individu, mais pas au sens d'un collectivisme: on peut opposer complètement communisme et collectivisme. Nous sommes dans une société tellement individualiste où la question du rapport à l'autre, du lien social en général, est devenu tellement problématique que nous avons beaucoup de mal à retrouver la dimension du commun, qui est quand même la dimension dans laquelle nous sommes, je pourrais dire de naissance, ou de manière plus philosophique, ontologiquement. Nous ne sommes jamais seul: Il y en a d'abord plusieurs. Le communisme c'est le mot qui, à travers l'Histoire, celle du monde moderne, est venu porter cette demande, ce désir: Comment sommes-nous en commun? parce que notre existence commune a été fragmentée, divisée, par la civilisation. Le communisme porte ce que la religion (et aussi bien la religion civile, qui était celle de Rome ou d'Athènes) ne peut plus porter. Ce n'est presque pas un concept, c'est plus un appel, une demande, un désir.

Désert. Dans l'interview du Libé de ce matin[*], vous parlez de la disparition de la gauche, c'est un constat amer. D'où pourrait venir, selon vous, le nouvel esprit de gauche?
 Premièrement, il est là en tant qu'esprit, exigence, de la justice. Ça, ce n'est pas perdu. Non seulement, ce n'est pas perdu, mais c'est énormément aiguisé par l'injustice croissante du dernier développement du capitalisme. Là, il y a quelque chose qui est très profondément de gauche, si on veut dire que la gauche c'est au moins le sens que la justice n'est pas donnée (par la nature, ou par Dieu).
Deuxièmement, je crois que pour retrouver plus qu'une exigence de justice, qui ne débouche pas à elle toute seule sur une politique, une action de terrain, je crois qu'il faut faire une sorte de pas en arrière de la politique au sens strict. Il faut une réflexion sur notre société, et même notre civilisation. Au lieu que la gauche, depuis 1789, s'appuie sur l'idée d'un homme donné naturellement libre, égal, fraternel, il nous faut apprendre que cet homme n'est pas donné, il nous faut inventer de penser autrement l'homme.

Cécilia. Vous dites que nous sortons de l'âge de l'Histoire pour entrer quand l'âge de l'Espace, pourriez-vous m'expliquez ce que vous entendez par là?
 Nous sortons de l'âge de l'Histoire entendu comme succession d'étapes dans un certain progrès, vers un certain aboutissement. L'espace, ici, voudrait dire que nous apprenons que pour le moment, peut être nous ne savons pas vers où nous allons, mais que nous sommes tous ensemble dans un même et unique espace, qui est le monde dans lequel il nous faut inventer des rapports, qui ne peuvent plus avoir la garantie d'un avenir, comme celui d'une humanité réconciliée avec elle-même et avec la nature. Espace veut dire simultanéité et distance entre nous tous. Nous sommes tous ensemble et, en même temps, il y a de la distance, de la différence, et comment fait-on avec cela, sans aucune promesse d'unité terminale?

Saxifrage. Vous avez écrit quelque part: «Le poème fait le difficile», pouvez-vous développer? L'expression me plaît beaucoup.
 Cela veut dire «le poème est rebelle» à l'accomplissement de sens. Par exemple, ça veut dire que je ne fais pas le difficile, si j'accepte qu'on me dise «tous les hommes seront frères»: c'est de la prose et de l'idéologie. Tandis que le poème ne va jamais dire une chose pareille! Le poème résiste à la livraison de significations toutes ficelées. Il ouvre des significations mal ficelées, pas ficelées, il défait, délie les nouages de significations, et ouvre la possibilité de questionner, de chercher.

Willocq. Dans l'interview que vous donnez à Libération aujourd'hui, vous parlez de «justice sociale minimale pour aujourd'hui», est-ce que vous pensez cette justice sociale minimale «pour attendre mieux» ou comme seule solution ?
 Il y a une base minimale qui n'est pas si facile à définir, je vous l'accorde, ça ne veut pas dire que c'est forcément le «revenu minimal garanti». Nous savons quand même, en  gros, ce qui est exigible comme justice: que les gens mangent, se logent, se soignent, et là, ça devient délicat, qu'ils puissent avoir du travail. Déjà, même la question du travail est délicate et, peut être, que dans les conditions  techniques actuelles, il n'est pas évident que tout le monde doive travailler. Il y a beaucoup de questionnements. Mais je reconnais que l'ordre des questions, des incertitudes: manger, se loger, c'est relativement simple, se soigner est déjà un peu plus complexe. Ne faut-il pas aussi se méfier du désir de santé qui est exhorbitant?
C'est justement en réfléchissant aux possibilités de déterminer le minimum (manger, se loger, être soigné) pour qu'au-delà les gens puissent accéder à autre chose (s'instruire) que l'on pourra réfléchir sur notre société: qu'est-ce que nous voulons? Aujourd'hui, la prépondérance des normes des matières scientifiques témoigne d'un choix, en partie peut-être inconscient, qui est plutôt un choix de la société (la grosse mécanique sociale), plutôt que d'un choix réfléchi sur ce que nous voulons comme monde, comme culture.

Schlomo767. Vous dites qu'il faut une réflexion sur notre société, mais les intérêts de ceux qui possèdent les moyens de diffusion de l'information n'en ont aucun besoin, les politiques encore moins ! Quel serait cet Espace où nous pourrions réfléchir?
 Cet espace il existe quand même. La preuve, là, maintenant, où je vous réponds. Il est vrai que les moyens d'information et de communication sont entre les mains de puissances économiques et politiques, mais il est vrai aussi que le développement des mêmes moyens, par exemple par internet, mais pas seulement, même dans la presse papier, les livres, la radio permet quand même une circulation, une agitation, des idées. Il ne faut pas être dans la victimisation. Je n'ai jamais trop cru qu'on était dans la télécratie. Ce n'est pas seulement la domination des «grands méchants» qui font avaler tout ce qu'ils veulent. Nous avons, pas seulement le droit, mais nous avons accès à la parole: il n'y a qu'à parler! Vous posez votre question, je vous réponds.
A travers tout le XVIIIème siècle, où il n'y avait pas internet... il y avait une quantité énorme de discussions, de diffusions d'idées, qui a fait qu'en 1789, la Révolution n'a pas été seulement le fait d'une poignée de notables. Elle répondait à quelque chose qui commençait à être articulé par beaucoup dans le pays, pas par tous, mais par beaucoup, même chez les paysans. D'une autre manière, pendant le stalinisme, tout le poids énorme de ce régime n'a pas empêché une intense activité de réflexions, et d'échanges d'idées.

 

[* 낭시 인터뷰기사] «Le sens de l’histoire a été suspendu»
http://www.liberation.fr/livres/0101571243-le-sens-de-l-histoire-a-ete-suspendu

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바디우,2009) 공산주의적 가설 & 철학...

이번달 7일에 나온 바디우의 새 책, <공산주의적 가정(가설)>(hypothèse communiste)에 대한 소개기사와 발췌문이 며칠동안이나 뤼마니떼(l'Humanite)에 걸려있었지만, 바디우의 진지한 가정은 아니리라는 내 건방진 판단으로 그냥 지나치곤 했었는데, 오늘 마침내 "공산주의: 가정에서 실천으로"라는 제목을 단 비판기사가 나왔다. 비판기사의 필자는 '아무나'가 아니고 빵세( Pensée)라는 권위있는 철학잡지의 부 편집자라니 운동권적 비판기사는 아니리라 여겨진다. 바디우 책의 소개기사와 발췌문은 좀 길기 때문에 비판기사를 먼저 읽고 그 대상물의 독서 여부를 결정하도록 여기서는 순서를 조정한다.

책 그림을 퍼오다보니 바디우는 지난 1월에도 <공산당 선언>에 빗댄 듯한 제목의 책, <두번째 철학선언>(Second manifeste pour la philosophie-철학을 위한 제2의 선언)을 출판한 것으로 돼 있다. 참, 노인이 막판에 무슨 남은 미련이 그리 많은지 엄청난 열정을 보이고 있는데, 두 책 모두 별로 두껍지도 비싸지도 않은 걸로 봐서 대단한 역작은 아닐 듯하고 그냥 그렇지 싶다. 두껍다고 다 좋은 책인 것은 아니겠지만, 랑시에르도 그렇고 바디우도, 왜 대가라는 사람들이 살 날도 얼마 안 남았을텐데 고전이 될만한 역작은 안 쓰고 자잘한(!) 다작으로 승부를 거는지(더 승부할 것도 없을텐데!)가 나는 좀 의문이다. '작은' 책도 따라가기가 힘겨운 처지(꼴)에 주제넘는 불평인지는 모르겠지만, 오히려 그래서 교과서 같은 기본서 한 권이 나는 더 그립다. 어쨌건 선택권이 내게 있는 게 아니니 따라는 가본다.

 

Second manifeste pour la philosophieCirconstances : Tome 5, L'hypothèse communiste 

Alain Badiou, Circonstances : Tome 5, L'hypothèse communiste, Nlles Ed. Lignes (7 avril 2009), 205 p., 15 euros.
Alain Badiou, Second manifeste pour la philosophie, Fayard (14 janvier 2009), 155p., 14euros.

 

 

[비판글]

Communisme : de « l’hypothèse » à la pratique
Tribune libre - Article paru le 25 avril 2009 l’Humanité des débats

Par Aymeric Monville, rédacteur en chef adjoint de la revue la Pensée, directeur des éditions Delga.

 

Pourqquoi faut-il prolonger le débat ouvert par Alain Badiou ?
Des phénomènes aussi divers que les conflits sociaux qui surgissent spontanément à la faveur de la crise, ou encore l’arrivée sur le devant de la scène d’intellectuels « extérieurs » au PCF mais revendiquant haut et fort le terme de communisme sont autant de symptômes d’un mouvement de fond qui parcourt la société française. Comme militants communistes, on ne saurait ni l’ignorer ni accepter qu’on en reste là. Dans tout conflit politique d’envergure apparaissent toujours des luttes spontanées, lesquelles passent ensuite à un niveau supérieur d’organisation. On peut débattre de la manière dont il convient d’articuler mouvement spontané et parti organisé. Mais il ne faut pas confondre la spontanéité des luttes et l’idéologie spontanéiste, qui prétend se passer de tout parti. Extrémité que même une dirigeante historique comme Rosa Luxemburg, réputée plus méfiante envers la bureaucratie, pour des raisons nationales et historiques évidentes, n’a bien entendu jamais envisagée. Franchissant néanmoins le pas, le philosophe Alain Badiou proposait récemment dans ces colonnes d’en finir avec la forme-parti (*). Mais on ne trouve pas, pour le moins, dans ses propositions, de garanties suffisantes permettant de continuer à articuler, comme est censé le faire un Parti communiste, le contrôle démocratique de la base et la perspective d’un débouché politique. Force est de reconnaître que la révolution culturelle chinoise, proposée en exemple dans ce point de vue, a perdu sur les deux tableaux : elle a non seulement détruit le parti de la Longue Marche, mais elle a également noyé dans le chaos l’effort gigantesque du peuple chinois pour entrer dans la démocratie socialiste. Mais la forme-parti n’est pas la seule à subir une forclusion ; les classes sociales sont étonnamment absentes de cette réflexion d’Alain Badiou, à tel point qu’on peut parler d’individualisme méthodologique. Malgré les références directes à Platon et suggérées à Lacan, il semble que c’est plutôt dans le sillage de Sartre que le philosophe va chercher sa théorie de la subjectivité. Cette subjectivité, certes glorieuse, sait trouver le chemin des grands élans collectifs. Mais le risque que présente ce volontarisme ou, plutôt, pour prendre les termes du philosophe, cette « projection héroïque mais individuelle », est de partir d’une morale du « devoir être », au mépris des contingences, et non d’une morale objective et de l’analyse concrète des forces politiques en présence. Avec les conséquences meurtrières que l’on sait… C’est un risque similaire que l’on court à abandonner une perspective historique face à l’État, laquelle doit, en effet, beaucoup à Hegel, bête noire de Badiou, mais aussi à Gramsci. Pour Alain Badiou, l’État, n’est perçu qu’en termes de contraintes et jamais de possibilités. Il ne s’agit plus de chercher, comme dans la tradition marxiste, en quoi l’État s’articule sur le processus qui conduit du règne de la nécessité à celui de la liberté, ni de comprendre sur quels rapports de forces s’établit la domination de classe de l’État. Bien au contraire, c’est l’inscription dans le réel du projet communiste qu’il s’agit de déchiffrer, comme une réalité déjà à l’oeuvre aujourd’hui non simplement dans les esprits, mais dans l’évolution du mode de production. Certes, pas comme une nécessité mécanique, mais comme une possibilité permise par le développement des forces productives et les luttes en cours, perspective qui constitue l’un des apports cruciaux de Marx par rapport au socialisme utopique.

(*) voir l’Humanité du 17 avril 2009.

 


Philosophie
L'Hypothèse communiste, par Alain Badiou
EXCLUSIVITÉ. Le nouveau livre événement du philosophe Alain Badiou, l’Hypothèse communiste, sort en librairie ce samedi 18 avril. L’auteur et son éditeur, Nouvelles Éditions Lignes, nous ont donné leur accord pour en publier des extraits.

On pourrait suggérer sans ironie : de quoi Alain Badiou est-il le nom ? Ou proposer une variante plus signifiante encore : de quoi Alain Badiou est-il le signe ? Admettons que ces deux questionnements, parce qu’ils « disent » quelque chose de notre ici-maintenant et révèlent aux yeux de tous quelques marqueurs originaux de notre inconscient collectif, restent intimement mêlés. Au fond, qui n’a jamais lu le moindre de ses livres, à commencer par le sulfureux et fascinant De quoi Sarkozy est-il le nom ? publié en 2007 (1), ne peut comprendre comment et pourquoi Alain Badiou s’est subitement imposé tel un météore sur la scène médiatique intellectuelle - d’ordinaire très hermétique et autocentrée sur quelques noms, BHL, Finkielkraut et consorts - alors que ce même homme, professeur à la réputation « dithyrambique » à en croire ses élèves, arpente le monde de la philosophie et des idées en général depuis quarante ans déjà…

Car voilà. Le philosophe, mais également romancier et dramaturge, à soixante-douze ans, n’est pas que le pamphlétaire flingueur du capitalisme (et de tous ses valets zélés) qui annonce clairement : « S’agissant de l’antique capitalisme, le verdict, solidement étayé, me semble aller de soi : inacceptable, il doit être détruit. » Non, Badiou est aussi (et essentiellement, pourrait-on dire) l’un des théoriciens des ruptures. En somme, celui qui dérange et invite à repenser le monde, le rôle de l’État, les limites de la démocratie, l’idée républicaine, l’évolution des formes d’opposition, les combats sociaux, etc.

Ainsi, avec l’Hypothèse communiste, intitulé qui figurait déjà comme tel dans le dernier chapitre du livre consacré à Sarkozy et dont il embrasse cette fois toute l’ampleur, le philosophe affirme que l’idée communiste « en est encore, historiquement, à ses tous débuts ». À toutes fins utiles, l’auteur verbalise, pour mieux la mettre à distance, la fameuse « preuve » historique de « l’échec » du communisme, à partir d’exemples caractéristiques (Commune de Paris, Mai 68, etc.). Donc, ce qu’il appelle « l’expérimentation historique des politiques » reste toujours ce à partir de quoi « on peut inventer de nouvelles solutions aux problèmes sur lesquels cette expérimentation a buté »…

Y a-t-il une hypothèse Alain Badiou ? En bousculant (avec quelques autres tout de même) l’ordre établi, le philosophe, érudit de toujours mais goguenard en diable, ne fait pas que sauver l’honneur. Par les temps qui courent, il incarne à sa manière une forme de courage qui nous surprend tous. Jusque dans ses éclats. (Jean-Emmanuel Ducoin)

(1) Déjà chez Nouvelles Éditions Lignes.

 

 


 

« Bonnes feuilles » [발췌문]


"Mon but aujourd’hui est de décrire une opération intellectuelle à laquelle je donnerai – pour des raisons qui, je l’espère, seront convaincantes - le nom d’Idée du communisme. Sans doute le moment le plus délicat de cette construction est-il le plus général, celui où il s’agit de dire ce que c’est qu’une Idée, non pas seulement au regard des vérités politiques (et dans ce cas, l’Idée est celle du communisme), mais au regard d’une vérité quelconque (et dans ce cas, l’Idée est une reprise contemporaine de ce que Platon tente de nous transmettre sous les noms d’eidos, ou d’idéa, ou même plus précisément d’Idée du Bien). Je laisserai implicite une bonne part de cette généralité, pour être aussi clair que possible en ce qui concerne l’Idée du communisme. (…)
J’appelle « Idée » une totalisation abstraite des trois éléments primitifs, une procédure de vérité, une appartenance historique et une subjectivation individuelle. On peut immédiatement donner une définition formelle de l’Idée : une Idée est la subjectivation d’une relation entre la singularité d’une procédure de vérité et une représentation de l’Histoire. Dans le cas qui nous occupe, on dira qu’une Idée est la possibilité, pour un individu, de comprendre que sa participation à un processus politique singulier (son entrée dans un corps-de-vérité) est aussi, en un certain sens, une décision historique. Avec l’Idée, l’individu, en tant qu’élément du nouveau Sujet, réalise son appartenance au mouvement de l’Histoire. Le mot « communisme » a été durant environ deux siècles (depuis la « Communauté des Égaux » de Babeuf jusqu’aux années quatrevingt du dernier siècle) le nom le plus important d’une Idée située dans le champ des politiques d’émancipation, ou politiques révolutionnaires. Être un communiste, c’était sans doute être un militant d’un Parti communiste dans un pays déterminé. Mais être un militant d’un Parti communiste, c’était être un des millions d’agents d’une orientation historique de l’Humanité tout entière. La subjectivation liait, dans l’élément de l’Idée du communisme, l’appartenance locale à une procédure politique et l’immense domaine symbolique de la marche de l’Humanité vers son émancipation collective. Donner un tract sur un marché était aussi monter sur la scène de l’Histoire.

On comprend dès lors pourquoi le mot « communisme » ne peut pas être un nom purement politique : il lie en effet, pour l’individu dont il soutient la subjectivation, la procédure politique à autre chose qu’elle-même. Il ne peut pas non plus être un mot purement historique. Car, sans la procédure politique effective, dont nous verrons qu’elle détient une part irréductible de contingence, l’Histoire n’est qu’un symbolisme vide. Et enfin, il ne peut pas être non plus un mot purement subjectif, ou idéologique. Car la subjectivation opère « entre » la politique et l’histoire, entre la singularité et la projection de cette singularité dans une totalité symbolique, et, sans ces matérialités et ces symbolisations, elle ne peut advenir au régime d’une décision. Le mot « communisme  » a le statut d’une Idée, ce qui veut dire que, à partir d’une incorporation, et donc de l’intérieur d’une subjectivation politique, ce mot dénote une synthèse de la politique, de l’histoire et de l’idéologie. C’est pourquoi il vaut mieux le comprendre comme une opération que comme une notion. (…)

Il est aujourd’hui essentiel de bien comprendre que « communiste » ne peut plus être l’adjectif qui qualifie une politique. Ce court-circuit entre le réel et l’Idée a donné des expressions dont il a fallu un siècle d’expériences à la fois épiques et terribles pour comprendre qu’elles étaient mal formées, expressions comme « Parti communiste » ou - c’est un oxymore que l’expression « État socialiste » tentait d’éviter - « État communiste ». On peut voir dans ce court-circuit l’effet au long cours des origines hégéliennes du marxisme. Pour Hegel en effet, l’exposition historique des politiques n’est pas une subjectivation imaginaire, c’est le réel en personne. Car l’axiome crucial de la dialectique telle qu’il la conçoit est que « le Vrai est le devenir de lui-même », ou, ce qui revient au même, « le Temps est l’être-là du Concept ». Dès lors, selon le legs spéculatif hégélien, on est fondé à penser que l’inscription historique, sous le nom de « communisme », des séquences politiques révolutionnaires, ou des fragments disparates de l’émancipation collective, révèle leur vérité, qui est de progresser selon le sens de l’Histoire. (…) Il faut donc commencer par les vérités, par le réel politique, pour identifier l’Idée dans la triplicité de son opération : réel-politique, symbolique-Histoire, imaginaire-idéologie. Je commence par quelques rappels de mes concepts usuels, sous une forme très abstraite et très simple.

J’appelle « événement » une rupture dans la disposition normale des corps et des langages telle qu’elle existe pour une situation particulière (…). L’important est ici de remarquer qu’un événement n’est pas la réalisation d’une possibilité interne à la situation, ou dépendante des lois transcendantales du monde. Un événement est la création de nouvelles possibilités. Il se situe, non pas simplement au niveau des possibles objectifs, mais à celui de la possibilité des possibles. (…) J’appelle « État », ou « état de la situation  », le système des contraintes qui, précisément, limitent la possibilité des possibles. On dira aussi bien que l’État est ce qui prescrit, ce qui, dans une situation donnée, est l’impossible propre de cette situation, à partir de la prescription formelle de ce qui est possible. L’État est toujours la finitude de la possibilité, et l’événement en est l’infinitisation. Qu’est-ce qui aujourd’hui, par exemple, constitue l’État au regard des possibles politiques ? Eh bien, l’économie capitaliste, la forme constitutionnelle du gouvernement, les lois (au sens juridique) concernant la propriété et l’héritage, l’armée, la police… On voit comment, au travers de tous ces dispositifs, de tous ces appareils, y compris ceux, naturellement, qu’Althusser nommait « appareils idéologiques d’État » – et qu’on pourrait définir par un but commun : interdire que l’Idée communiste désigne une possibilité –, l’État organise et maintient, souvent par la force, la distinction entre ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. Il en résulte clairement qu’un événement est quelque chose qui advient en tant que soustrait à la puissance de l’État. J’appelle « procédure de vérité », ou « vérité  », une organisation continue, dans une situation (dans un monde), des conséquences d’un événement. On notera aussitôt qu’un hasard essentiel, celui de son origine événementielle, coappartient à toute vérité. J’appelle « faits » les conséquences de l’existence de l’État. On remarque que la nécessité intégrale est toujours du côté de l’État. On voit donc qu’une vérité ne peut être composée de purs faits. La part non factuelle d’une vérité relève de son orientation, et on la dira subjective. On dira aussi que le « corps » matériel d’une vérité, en tant qu’il est subjectivement orienté, est un corps exceptionnel. Usant sans complexe d’une métaphore religieuse, je dis volontiers que le corps-de-vérité, pour ce qui en lui ne se laisse pas réduire aux faits, peut être nommé un corps glorieux. Concernant ce corps, qui est celui, en politique, d’un nouveau Sujet collectif, d’une organisation de multiples individus, on dira qu’il participe de la création d’une vérité politique. S’agissant de l’État du monde dans lequel cette création est active, on parlera de faits historiques. L’Histoire comme telle, composée de faits historiques, n’est nullement soustraite à la puissance de l’État. L’Histoire n’est ni subjective ni glorieuse. Il faut plutôt dire que l’Histoire est l’histoire de l’État.

On peut alors revenir à notre propos concernant l’Idée communiste. Si une Idée est, pour un individu, l’opération subjective par laquelle une vérité réelle particulière est imaginairement projetée dans le mouvement symbolique d’une Histoire, nous pouvons dire qu’une Idée présente la vérité comme si elle était un fait. Ou encore : que l’Idée présente certains faits comme symboles du réel de la vérité. C’est ainsi que l’Idée du communisme a pu permettre qu’on inscrive la politique révolutionnaire et ses partis dans la représentation d’un sens de l’Histoire dont le communisme était l’aboutissement nécessaire. Ou qu’on a pu parler d’une « patrie du socialisme », ce qui revenait à symboliser la création d’un possible, fragile par définition, grâce à la massivité d’un pouvoir. L’Idée, qui est une médiation opératoire entre le réel et le symbolique, présente toujours à l’individu quelque chose qui se situe entre l’événement et le fait. C’est pourquoi les interminables discussions concernant le statut réel de l’Idée communiste sont sans issue. S’agit-il d’une Idée régulatrice, au sens de Kant, sans efficace réelle, mais capable de fixer à notre entendement des finalités raisonnables ? Ou s’agit-il d’un programme qu’il faut peu à peu réaliser par l’action sur le monde d’un nouvel État postrévolutionnaire ? Est-ce une utopie, voire une utopie dangereuse, et même criminelle  ? Ou est-ce le nom de la Raison dans l’Histoire ? On ne saurait mener à bien ce type de discussion, pour la raison que l’opération subjective de l’Idée est composée, et non simple. Elle enveloppe, comme sa condition réelle absolue, l’existence de séquences réelles de la politique d’émancipation, mais elle suppose aussi le déploiement d’une palette de faits historiques aptes à la symbolisation. Elle ne dit pas (ce qui serait soumettre la procédure de vérité aux lois de l’État) que l’événement et ses conséquences politiques organisées sont réductibles à des faits. (…) Mais elle ne l’est qu’autant qu’elle reconnaît comme son réel cette dimension aléatoire, fuyante, soustraite et insaisissable. C’est pourquoi il appartient à l’Idée communiste de répondre à la question « D’où viennent les idées justes ? » comme le fait Mao : les « idées justes » (entendons : ce qui compose le tracé d’une vérité dans une situation) viennent de la pratique. On comprend évidemment que « pratique » est le nom matérialiste du réel. (…)

Tout cela explique, et dans une certaine mesure justifie, qu’on ait pu à la fin aller jusqu’à l’exposition des vérités de la politique d’émancipation dans la forme de leur contraire, soit la forme d’un État. Puisqu’il s’agit d’un rapport idéologique (imaginaire) entre une procédure de vérité et des faits historiques, pourquoi hésiter à pousser ce rapport à son terme, pourquoi ne pas dire qu’il s’agit d’un rapport entre événement et État ? L’État et la Révolution, tel est le titre d’un des plus fameux textes de Lénine. Et c’est bien de l’État et de l’Événement qu’il s’agit. Cependant, Lénine, suivant Marx sur ce point, prend bien soin de dire que l’État dont il sera question après la Révolution devra être l’État du dépérissement de l’État, l’État comme organisateur de la transition au nonÉtat. Disons donc ceci : l’Idée du communisme peut projeter le réel d’une politique, toujours soustrait à la puissance de l’État, dans la figure historique d’un « autre État », pourvu que la soustraction soit interne à cette opération subjectivante, en ce sens que « l’autre État » est lui aussi soustrait à la puissance de l’État, donc à sa propre puissance, en tant qu’il est un État dont l’essence est de dépérir.

C’est dans ce contexte qu’il faut penser et approuver l’importance décisive des noms propres dans toute politique révolutionnaire. (…) Pourquoi ce glorieux Panthéon des héros révolutionnaires ? Pourquoi Spartacus, Thomas Münzer, Robespierre, Toussaint- Louverture, Blanqui, Marx, Lénine, Rosa Luxemburg, Mao, Che Guevara, et tant d’autres ? C’est que tous ces noms propres symbolisent historiquement, dans la forme d’un individu, d’une pure singularité du corps et de la pensée, le réseau à la fois rare et précieux des séquences fuyantes de la politique comme vérité. Le formalisme subtil des corps-de-vérité est ici lisible en tant qu’existence empirique. L’individu quelconque trouve des individus glorieux et typiques comme médiation de sa propre individualité, comme preuve qu’il peut en forcer la finitude. L’action anonyme de millions de militants, d’insurgés, de combattants, par elle-même irreprésentable, est rassemblée et comptée pour un dans le symbole simple et puissant du nom propre. Ainsi, les noms propres participent de l’opération de l’Idée, et ceux que nous avons cités sont des composantes de l’Idée du communisme dans ses différentes étapes. (…) Récapitulons aussi simplement que possible. Une vérité est le réel politique. L’Histoire, y compris comme réservoir de noms propres, est un lieu symbolique. L’opération idéologique de l’Idée du communisme est la projection imaginaire du réel politique dans la fiction symbolique de l’Histoire, y compris sous la forme d’une représentation de l’action des masses innombrables par l’Un d’un nom propre. La fonction de cette Idée est de soutenir l’incorporation individuelle à la discipline d’une procédure de vérité, d’autoriser à ses propres yeux l’individu à excéder les contraintes étatiques de la survie en devenant une partie du corps-de-vérité, ou corps subjectivable.

On demandera maintenant : pourquoi estil nécessaire d’avoir recours à cette opération équivoque ? Pourquoi l’événement et ses conséquences doivent-ils aussi être exposés sous la forme d’un fait, et souvent d’un fait violent, qu’accompagnent des variantes du « culte de la personnalité » ? Pourquoi cette assomption historique des politiques d’émancipation ? La raison la plus simple est que l’histoire ordinaire, l’histoire des vies individuelles, est tenue dans l’État. L’histoire d’une vie est par ellemême, sans décision ni choix, une part de l’histoire de l’État, dont les médiations classiques sont la famille, le travail, la patrie, la propriété, la religion, les coutumes… La projection héroïque, mais individuelle, d’une exception à tout cela – comme est une procédure de vérité – veut aussi être en partage avec les autres, elle veut se montrer non seulement comme exception, mais aussi comme possibilité désormais commune à tous. Et c’est une des fonctions de l’Idée : projeter l’exception dans l’ordinaire des existences, remplir ce qui ne fait qu’exister d’une dose d’inouï. Convaincre mes entours individuels, époux ou épouse, voisins et amis, collègues, qu’il y a aussi la fabuleuse exception des vérités en devenir, que nous ne sommes pas voués au formatage de nos existences par les contraintes de l’État. Bien entendu, en dernier ressort, seule l’expérience nue, ou militante, de la procédure de vérité, forcera l’entrée de tel ou tel dans le corps-de-vérité. Mais pour l’amener au point où cette expérience se donne, pour le rendre spectateur, et donc déjà à demi-acteur, de ce qui importe à une vérité, la médiation de l’Idée, le partage de l’Idée sont presque toujours nécessaires. L’Idée du communisme (quel que soit par ailleurs le nom qu’on lui donne, qui n’importe guère : aucune Idée n’est identifiable à son nom) est ce à travers quoi on peut parler le processus d’une vérité dans le langage impur de l’État, et déplacer ainsi, pour un temps, les lignes de force par quoi l’État prescrit ce qui est possible et ce qui est impossible. Le geste le plus ordinaire, dans cette vision des choses, est d’amener quelqu’un à une vraie réunion politique, loin de chez lui, loin de ses paramètres existentiels codés, dans un foyer d’ouvriers maliens, par exemple, ou à la porte d’une usine. Venu au lieu où une politique procède, il décidera de son incorporation ou de son repli. Mais pour venir au lieu, il faut que l’Idée – et depuis deux siècles, ou peut-être depuis Platon, c’est l’Idée du communisme – le prédéplace dans l’ordre des représentations, de l’Histoire et de l’État. Il faut que le symbole vienne imaginairement à l’appui de la fuite créatrice du réel. (…)

La seconde raison est que tout événement est une surprise. S’il ne l’était pas, c’est qu’il aurait été prévisible en tant que fait, et du coup s’inscrirait dans l’histoire de l’État, ce qui est contradictoire. On peut alors formuler le problème ainsi : comment nous préparer à de telles surprises ? Et cette fois le problème existe, même si nous sommes déjà actuellement militants des conséquences d’un événement antérieur, même si nous sommes inclus dans un corps-de-vérité. Certes, nous proposons le déploiement de nouveaux possibles. Mais l’événement qui vient possibilisera ce qui, même pour nous, reste encore impossible. Pour anticiper, au moins idéologiquement, ou intellectuellement, la création de nouveaux possibles, nous devons avoir une Idée. Une Idée qui enveloppe bien entendu la nouveauté des possibles que la procédure de vérité dont nous sommes les militants a mis à jour, et qui sont des possibles-réels, mais qui enveloppe aussi la possibilité formelle d’autres possibles, par nous encore insoupçonnés. Une Idée est toujours l’affirmation qu’une nouvelle vérité est historiquement possible. Et puisque le forçage de l’impossible en direction du possible se fait par soustraction à la puissance de l’État, on peut dire qu’une Idée affirme que ce processus soustractif est infini : il est toujours formellement possible que la ligne de partage fixée par l’État entre le possible et l’impossible soit encore une fois déplacée, si radicaux que puissent avoir été ses précédents déplacements, y compris celui auquel nous participons actuellement en tant que militants. (…) Cela nous permet de conclure sur les inflexions contemporaines de l’Idée du communisme. Le bilan actuel de l’Idée du communisme, je l’ai dit, est que la position du mot ne peut plus être celle d’un adjectif, comme dans « Parti communiste » ou « régimes communistes  ». La forme-Parti, comme celle de l’Étatsocialiste, sont désormais inadéquates pour assurer le soutien réel de l’Idée. Ce problème a du reste trouvé une première expression négative dans deux événements cruciaux des années soixante et soixante-dix du dernier siècle : la Révolution culturelle en Chine, et la nébuleuse nommée « Mai68 » en France. Ensuite, de nouvelles formes politiques ont été et sont encore expérimentées, qui relèvent toutes de la politique sans-parti. À échelle d’ensemble, cependant, la forme moderne, dite « démocratique », de l’État bourgeois, dont le capitalisme mondialisé est le support, peut se présenter comme sans rivale dans le champ idéologique. Pendant trois décennies, le mot « communisme » a été soit complètement oublié, soit pratiquement identifié à des entreprises criminelles. C’est pourquoi la situation subjective de la politique est devenue partout si confuse. Sans Idée, la désorientation des masses populaires est inéluctable.

Cependant, de multiples signes (…) indiquent que cette période réactive s’achève. Le paradoxe historique est que, en un certain sens, nous sommes plus proches de problèmes examinés dans la première moitié du XIXe siècle que de ceux que nous héritons du XXe siècle. Comme aux alentours de 1840, nous sommes confrontés à un capitalisme cynique, sûr d’être la seule voie possible d’organisation raisonnable des sociétés. On insinue partout que les pauvres ont tort de l’être, que les Africains sont arriérés, et que l’avenir appartient, soit aux bourgeoisies « civilisées » du monde occidental, soit à ceux qui, à l’instar des Japonais, suivront le même chemin. On trouve, aujourd’hui comme à l’époque, des zones très étendues de misère extrême à l’intérieur même des pays riches. On trouve, entre pays comme entre classes sociales, des inégalités monstrueuses et croissantes. La coupure subjective et politique entre les paysans du tiers-monde, les chômeurs et les salariés pauvres de nos sociétés « développées  » d’un côté, les classes moyennes « occidentales  » de l’autre, est absolue, et marquée par une sorte d’indifférence haineuse. Plus que jamais le pouvoir politique, comme la crise actuelle le montre avec son unique mot d’ordre, « sauver les banques », n’est qu’un fondé de pouvoir du capitalisme. Les révolutionnaires sont désunis et faiblement organisés, de larges secteurs de la jeunesse populaire sont gagnés par un désespoir nihiliste, la grande majorité des intellectuels sont serviles. Opposés à tout cela, aussi isolés que Marx et ses amis au moment du rétrospectivement fameux Manifeste du Parti communiste de 1847, nous sommes de plus en plus nombreux cependant à organiser des processus politiques de type nouveau dans les masses ouvrières et populaires, et à chercher tous les moyens de soutenir dans le réel les formes renaissantes de l’Idée communiste. Comme au début du XIXe siècle, ce n’est pas de la victoire de l’Idée qu’il est question, comme ce sera le cas, bien trop imprudemment et dogmatiquement, durant toute une partie du XXe. Ce qui importe d’abord est son existence et les termes de sa formulation. D’abord, donner une forte existence subjective à l’hypothèse communiste, telle est la tâche dont s’acquitte à sa manière notre assemblée d’aujourd’hui. Et c’est, je veux le dire, une tâche exaltante. En combinant les constructions de la pensée, qui sont toujours globales et universelles, et les expérimentations de fragments de vérités, qui sont locales et singulières, mais universellement transmissibles, nous pouvons assurer la nouvelle existence de l’hypothèse communiste, ou plutôt de l’Idée du communisme, dans les consciences individuelles. Nous pouvons ouvrir la troisième période d’existence de cette Idée. Nous le pouvons, donc nous le devons."

© Nouvelles Éditions Lignes

 

[댓글] Posté le jeudi 16 avril 2009 par lola
L'Hypothèse communiste, par Alain Badiou
Un nouvel opus…acheté hier mercredi ! Formidable, mais Badiou n'a jamais rien publié de médiocre alorsil n'y a là rien de nouveau. Badiou suscite l'intelligence du lecteur pour une raison simple : il s'adresse à son intelligence justement. Loin des propos pulsionnels ou liés au conformisme de l'opinion. Il ne s'agit pas d'avaler tout cru des "thèses" mais d'exercer sa faculter critique en nous hissant grâce à l'aide de Badiou au niveau des questions posées : Qu'est ce qu'une vie juste ?Comment renouer avec le communisme ?Qu'est ce que l'émancipation aujourd'hui ?…

 

[참고] Les autres articles :Entretien avec A. Badiou : « L’hypothèse de l’émancipation reste l’hypothèse communiste »
http://www.humanite.fr/2007-11-06_Politique_Alain-Badiou-L-hypothese-de-l-emancipation-reste-l-hypothese?var_mode=calcul

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B.Latour, Actor-Network Theory (+art.3)

지난 1월부터 시작된, 이름하여 '21세기 진보 지식인 지도'라는 한겨레 기획물의 프랑스 편이 어제 부로 마감이 된 듯하다. 프랑스의 대표 주자로 나선(뽑힌) 사람은 바디우, 발리바르, 랑시에르, 낭시, 스티글레르, 라투르, 총 6명 이었다. 마지막 두 사람을 빼고는 모두가 작년인가의 교수신문에서 다룬 비슷한 기획에 출연을 했었고, 꼭 그래서만은 아니겠지만 그들의 유명세는 이제 국경을 넘어 멀리 한국땅에서도 상당하다고 봐도 되겠다. 또 그만큼이나 이번 기획에서 다뤄진 그들에 대한 글들은 펌질의 욕망을 자아낼 정도로 새롭거나, 심오하거나, 그도 아니면 체계적 정리였다고 보여지지는 않는다. 그나마 다행이게도 마지막 주자로 등장한 라투르(Bruno Latour, 1947~)에 대한 글은 약간 예외적인 듯하여 부분 펌질을 한다. 그렇다고 내가 그의 이론에 적극 공감하는 것은 아니고, 단지 참고할 가치는 있는 듯하다는 정도.

 

라투르의 사회학 이론의 핵심은 '행위자-연결망 이론'(ANT: Actor-Network Theory, théorie de l'acteur-réseau)이라는 것인 모양인데, 아래 김환석의 설명을 미리 옮기면 이런 것이다: "‘행위자-연결망 이론’이란 과학과 기술을 자연 실재의 단순한 반영으로 보는 입장이나 사회 실재에 의해 구성되는 것으로 보는 입장 모두를 거부한다. 그 대신에 행위자-연결망 이론은 인간과 비인간을 포함한 다양한 이질적 행위자들이 동맹을 맺어 공고한 연결망의 구축을 성취할 때 성공적으로 과학과 기술이 출현하며, 이 과정에서 사회 역시 새로운 모습으로 구성된다고 주장한다. 곧 과학기술과 사회는 연결망 구축의 결과로서 공동생산된다는 것이다." 이하 김환석 글의 핵심인 마지막 3 문단과 결론을 옮기고 번호는 내가 단다.

1/ 1990년대 탈냉전과 생태 위기의 본격적 전개에 따라 라투르는 행위자-연결망 이론이 이러한 지구적 문제에 던지는 철학적·정치적 함의를 모색하는 쪽으로 연구를 확대하였다. 그는 탈냉전이 기존의 낡은 근대주의적 정치를 벗어나 이제야말로 평화시대에 걸맞은 새로운 정치를 할 기회를 좌파에게 제공하고 있다고 강조한다. 그에 의하면 냉전 시대에는 그 치열했던 계급전쟁에도 불구하고 사실상 좌파와 우파 사이에 그리 큰 차이가 없었다. 즉 근대화의 필요성, 진보의 불가피성, 경제의 토대적 역할, 과학기술의 가치중립성 등에 대해 다양한 우파와 좌파 사이에 항상 깊은 의견일치가 있었다는 것이다. 그런데 탈냉전 이후에 우파뿐 아니라 좌파도 역시 ‘지구화’, ‘시장의 자유’, ‘탈규제’, ‘유연성’, ‘기술혁신’ 등을 외치며 누가 근대화를 더 잘 근대화하느냐를 두고 다투고 있을 뿐이라고 그는 꼬집는다. 오늘날 진정 중요한 문제는 수십억의 사람과 동물과 사물의 운명에 영향을 주는 지구 온난화, 종의 보존, 인구 증가, 환경오염, 유전공학의 영향 등이라고 그는 지적한다. 과학기술의 생산 및 소비와 관련된 이런 엄청난 ‘집단적 실험’이 그동안 아무 의정서도, 피드백 기회도, 사후보고도, 기록보관도, 모니터링도, 정당한 정치 과정도 없이 결정되어 왔다는 것이다.

 

2/ “근대화냐, 생태화냐”로 요약되는 그의 문제의식에서, 좌파는 근대화의 심화에 몰두하는 우파와 이제야말로 진정한 차이를 만들 기회를 만났다고 지적된다. 그러나 그가 주장하는 생태화는 “자연으로 돌아가라”고 외치는 현재의 녹색운동과는 다르다. 비인간들로만 구성된 절대적 ‘자연’ 개념에 의존하고 있는 녹색운동은 문제의 궁극적 원인인 근대주의를 탈피한 것이 결코 아니기 때문이다. 근대주의에서는 모든 실체들을 두 가지의 완전히 분리되는 존재론적 영역인 순수한 비인간들의 세계와 순수한 인간들의 세계로 나누고 있다. 이것은 데카르트의 물질/정신 이원론에서 비롯되어, 칸트의 객체/주체 이분법으로 전개되었고, 뒤르켐의 사회학에 와서는 자연/사회의 이분법으로 고정되었다. 여기서 전자는 물리법칙이 지배하는 ‘사실’의 세계이고, 후자는 영혼과 자유의지가 작동하는 ‘가치’의 세계로 간주된다. 근대인들은 의식으로는 이런 이분법에 몰두하고 있으면서 무의식적으로는 행위자-연결망을 통해 점점 더 수많은 잡종들을 양산하여 생태 위기를 초래하고 있다. 과학과 기술을 통해 만들어진 모든 사실과 인공물이 이러한 잡종들인데, 근대인들은 이들을 순수한 비인간으로 간주하여 ‘사실’ 세계로만 단순히 파악하려는 오류를 범하기 때문이다.

 

3/ 따라서 라투르는 새로운 정치생태학을 제안한다. 그것은 절대적 실재로서의 ‘자연’이나 이를 반영한다고 간주되는 유일한 ‘과학’, 또는 인간에게만 행위성을 부여하는 ‘사회’ 개념을 모두 거부한다. 그것은 인간과 비인간이 좀더 바람직하게 결합하는 공동세계(코스모스)의 점진적 구성을 지향한다. 이를 위해서는 모든 과학기술의 산물이 논란과 타협·조정의 정당한 정치적 과정을 거쳐서 공동세계의 구성원이 되어야 한다. 라투르는 이를 위해 ‘사실’을 구성하는 요소들을 ‘논란’과 ‘제도’로, ‘가치’를 구성하는 요소들을 ‘협의’와 ‘위계’로 분해한 다음에, ‘논란’과 ‘협의’를 상원으로 하고 ‘위계’와 ‘제도’를 하원으로 재편성하는 새로운 권력분립의 정치 모델을 제안하고 있다. 예를 들면 광우병의 원인이라 일컬어지는 단백질인 프리온의 경우, 상원에서는 그것이 어떤 것이며 과연 존재하는지 ‘논란’을 벌이고 이에 관련된 모든 행위자들(과학자, 축산농민, 도축장, 정부, 동물단체 등)이 충분히 ‘협의’를 하도록 맡긴다. 그 다음에 하원에서는 공동 세계에서 기존 구성원들과 프리온의 양립 가능성을 평가하고 상대적 위치를 조정하는 ‘위계’ 부여를 하고 마지막으로 이런 모든 과정을 거친 프리온에 대해서는 논의를 종결하고 ‘제도’로 받아들이는 것이다.

 

물론 위에서 상원과 하원이라 한 것은 비유적 용어이고 공동 세계의 구성을 위한 의사결정의 권한을 그렇게 나누자는 것이다. 요점은 이러한 정치 모델에서 자연/사회, 사실/가치의 이분법은 마침내 사라지며, 모든 사물들이 관련 행위자들의 논란과 협의 및 조정을 거쳐야만 공동 세계의 일원이 될 수 있다는 것이다. 아직 추상적이라는 비판이 없지 않으나, 라투르의 정치생태학은 지구적 혼돈과 생태위기 시대에 새로운 정치를 모색하는 이들에게 참신한 의제와 통찰을 던져주고 있는 것으로 보인다.

 

김환석, 혼돈의 시대 ‘정치생태학’에서 해법을 찾다, 21세기 진보 지식인 지도 / ⑦ 브뤼노 라투르 Bruno Latour, 기사등록 : 2009-04-10 오후 07:45:18  기사수정 : 2009-04-10 오후 07:48:50 ⓒ 한겨레 [김환석은 서울대에서 사회학을 전공한 뒤 영국 런던대 임페리얼칼리지에서 과학기술사회학으로 박사학위를 받았다. 현재 국민대 사회학과 교수이며, 시민과학센터 소장과 유네스코 세계과학기술윤리위원으로 활동중이다. 지은 책으로는 <과학사회학의 쟁점들>(문학과지성사), 번역한 책으로는 <과학학의 이해>(당대) 등이 있고, 현재 라투르의 책 <자연의 정치학>과 <사회학의 재구성>을 번역중이다.]

 

 

------- 여기까지가 새로 추가된 부분이고, 아래의 나머지는 지난 1월 포스트를 오늘 날짜로 자리만(약간 수정) 이동 ------

(기획물에 대한 서설은 '스티글레르, 기술(technique)과 삶의양식 http://blog.jinbo.net/radix/?pid=41' 을 참조하라)

 

 

[앞의 '스티글레르'에서 이어지는 글] 브리노 라뚜르는 철학이라기 보다는 사회학적 연구에 치중라는 것으로 보이고, 특히 뒤르께임의 정통 사회학과 부르디외를 비판하며 나름의 아주 독창적인(?) 사회학을 개척하려고 시도하는 듯하다. 그 독창성이 지나쳐서 때로 전통과 기본을 무시할 경우 흔히 관심의 대상에서 멀어질 수가 있겠는데, 라뚜르가 프랑스에서 갖는 위치가 약간은 그런 듯이 보이는데, 아마 그래서 영어로 활동을 많이 하는 듯하다 (아마 그 역인지도). 그는 현재 빠리정치학교(Sciences Po: l'Institut d'études politiques de Paris)의 교수로 재직 중이며, 학문적 계보는 미셸 쎄르(Michel Serres, 1930~)를 잇는 모양인데, 꼭 그만큼이나 프랑스 정통 학계에서는 멀어져 있는 듯하다. 즉, 쎄르가 다작과 유명세에도 불구하고 그의 책은 거의 아무도 인용을 않으며, 빠리정치학교에서 나오는 책은 거의가 참고문헌에서 제외되는 게 현실일 것이다. (참고로, 빠리정치학교를 김환식은 무슨 고등정치연구학교 비슷하게 글의 도입부에서 언급을 해뒀던데, 이 학교는 정치가나 언론인을 양성하는 학교이지 거의 학자를 배출하는 곳은 아니다.) [여기서 '거의'나 '듯하다'는 류의 표현을 내가 많이 사용한 것은 내 말이 100% 다 사실인 것은 아니라는 것.]

 

잘은 모르겠지만, 이래저래 훑어보다가, 라뚜르가 신문에 기고한 짧은 글 2개("정치 또는 혁명, 선택해야 한다"(뤼마니떼,2006-v), "좌파는 부르디외를 필요로 하는가?"(리베라씨옹,2008-ix))를 통해 그가 갖는 입장의 대강을, 그리고 나머지 1편에서는 다른 사람이 쓴 "브리노 라뚜르, 더듬기를 조직해야 한다는데.."(2006-iv)라는 글을 통해 라뚜르 이론에 대한 비판적 평가를 살펴보기 위하여 퍼다둔다 (언제 다 읽고 더 정확한 평가를 내릴지는 나도 모른다).

 

*

 

Politique ou révolution, il faut choisir / par  Bruno Latour
-L’Humanité 4 Mai 2006 (Mise en ligne le mardi 2 janvier 2007)

 
L’argument est très simple et il n’est pas sans importance pour ceux qui veulent passer du communisme à la composition du monde commun. La notion de révolution vient de l’astronomie, passe en histoire des sciences pour décrire la grande coupure entre, par exemple, alchimie et chimie, et se retrouve enfin en politique[1] . On l’utilise alors pour décrire les bouleversements du corps politique depuis la révolution anglaise, américaine et, en partie française. C’est donc un terme du 18° siècle, pour désigner l’invention douloureuse du gouvernement représentatif ; c’est ainsi qu’on l’utilise encore pour parler de révolution à Kiev ou à Minsk. [1] Rey, A. (1989). "Révolution" histoire d’un mot. Paris : Gallimard.

Le problème c’est qu’au 19° siècle, s’invente une autre notion que celle de corps politique : la grande idée d’une société, d’un système social, fusionnée d’ailleurs en France avec l’idée de l’Etat, lui-même héritier du roi, et, plus loin encore de l’Eglise. Or, cette société a ceci de particulier qu’elle est inventée précisément pour court-circuiter l’idée de composition politique : la société est toujours déjà là ; elle nous déborde de toutes part ; elle est d’un bloc ; elle détermine nos actions. L’immense avantage de la notion de société, par exemple chez Comte, chez Durkheim, c’est qu’elle est déjà composée et qu’elle explique les comportements de tous ses membres. Elle permet donc de faire l’économie de toute révolution. Et c’est là où les choses se compliquent pour finir tragiquement : les progressistes du 19° vont reprendre la notion de révolution, qu’on appliquait jusqu’ici avec un certain succès à la subversion du corps politique, pour essayer de « renverser la société » -société conçue tout exprès pour éviter de payer le prix politique de sa composition ! L’échec était inévitable : au contraire, la résistance même du système social à tout bouleversement semblait militer pour qu’on le renverse encore plus fortement. Ce fut alors qu’on inventa ce que Bernard Yack appelle la révolution totale [2]. On ne peut rien changer sans tout changer. Conséquence inattendue : donc on ne peut rien changer... [2] Yack, B. (1992). The Longing for Total Revolution : Philosophic Sources of Social Discontent from Rousseau to Marx and Nietzsche. Berkeley : University of California Press.

 

Ceux qui ont essayé malgré tout, ont payé en déception le prix amer que connaissent bien les lecteurs de ce journal. Il n’y a rien d’étonnant à ce qu’un concept fait pour éviter la politique empêche la reprise de la politique. C’est le contraire qui serait surprenant. La situation est d’ailleurs la même avec les écologistes qui ont essayé de reprendre la notion de nature, faite, elle aussi, pour court-circuiter la composition politique, et qui, pour les mêmes raisons ont échoué [3]. Inutile de remâcher le passé : laissons le terme de révolution à son siècle -le 18°-, la notion de société à son siècle -le 19°- la notion de nature à son siècle -le 20°-, pour nous intéresser à cette troisième forme d’existence commune, que j’appelle le collectif (je simplifie cela va de soi). Or l’immense différence entre la notion de collectif et celle de société c’est qu’il n’est pas déjà là, il ne forme pas système, il n’explique pas nos comportements, il ne définit pas d’avance nos attitudes et nos alliances. Le collectif oblige à prendre en compte les incertitudes, les combinaisons nouvelles -en particulier les associations si surprenantes entre ce que j’appelle les humains et les non-humains. Mais surtout, comme le collectif n’est pas l’Etat -et pas le marché-, comme il n’est pas déjà là, il faut le faire exister, il faut donc le composer. [3] Latour, B. (1999). Politiques de la nature. Comment faire entrer les sciences en démocratie. Paris : La Découverte.

 

On pouvait révolutionner le corps politique -pour inventer des formes plus ou moins bricolées de gouvernement représentatif- ; on ne peut pas révolutionner la société -elle était faite pour immuniser contre toute révolution totale ; mais on doit toujours recomposer le collectif et cela radicalement. A une petite condition toutefois : qu’on refasse de la politique ! Mais c’était déjà le cas, dira-t-on ? Non, puisque le monde commun était déjà constitué et qu’on savait plus ou moins de quoi il était composé et où il allait. On pouvait prendre des positions qui avaient l’apparence de la politique, et même de la politique radicale, mais qui, comme le Canada Dry, était au fond sans alcool. C’est ce que montre bien John Dewey [4] : faire de la politique est infiniment plus exigeant et plus radical que « faire la révolution », car il va falloir constituer un Public, une chose publique qui n’existe pas encore. Communistes, c’est le monde commun qu’il vous faut apprendre à composer ! [4] Dewey, J. (2003). Le public et ses problèmes, traduit de l’anglais et préfacé par Joelle Zask. Pau : Publications de l’Université de Pau/Léo Scheer.


http://fr.search.yahoo.com/search?p=bruno+latour+action&ei=UTF-8&rd=r2&fr=yfp-t-501&pstart=1&b=11

[빨간 강조문 주위로만 대충 번역하면] 우리는 정치체를 혁명적으로 바꿀 수는 있지만(왕정에서 공화정, 등), 사회를 혁명할 수는 없다. 사회란 전면적 변화나 혼돈에 맞서 스스로를 견뎌내기 위해 '이미' 만들어진 무엇이기 때문이다. 그러므로 우리가 혁명의 대상으로 삼아야할 것은 사회가 아니라, 그 사회 속의 '공동체성'(le collectif) 이다. 사회가 그렇고 그렇게 '이미 있는'(deja la) 무엇이라고 해서 '공동체성'도 벌써 존재하는 무엇이 바로 되는 것은 아니다. 사회와 공동체성의 엄밀한 구별이 필요하다. 사회는 이미 있지만, '공동체성'은 앞으로 만들어지고 구성되어져야 할 대상이라는 말이다. 이런 의미에서라면, 공동체성을 만들어가는 '정치'라는 것은 혁명 보다도 더 간절하고 근본적인 요청이 된다 (이 글의 제목이 <정치 또는 혁명, 선택해야 한다>라는 사실을 상기). 왜냐하면, 이미 말했듯이, 여기서 정치는 아직(encore) 존재하지도 않는 어떤 '공적 신체' 를 새로 만들어가는 엄청난 작업이기 때문이다. 바로 여기에 그 새로운 무엇의 조합을 학습하는 우리 공산주의자들이 있다. 

 

* *

 

La gauche a-t-elle besoin de Bourdieu? / par  Bruno Latour
Libération, Le mardi 15 septembre 1998.  
Bruno Latour est philosophe. Dernier ouvrage paru : Nous n'avons jamais été modernes, éd. La Découverte (1997).   


Faisons comme si la presse avait lancé un débat public pour évaluer l'intérêt de la pensée dominante en sociologie française, celle de Pierre Bourdieu et de ses collègues, sur la recomposition de la gauche. Pour y mettre mon grain de sel, je n'ai aucune autre qualification que celle d'un long intérêt pour les relations entre sciences et politique. Pour le moment, il me semble que l'effort d'inventaire a porté sur deux points: ses recherches scientifiques autorisent-elles Bourdieu à prendre des positions politiques? Peut-on, en s'appuyant sur la sociologie de la domination, développer une gauche plus authentique que celle des sociaux-démocrates? Aussi intéressantes qu'elles soient, ces deux discussions prennent pour acquis que la sociologie de Bourdieu serait scientifique et qu'elle serait de gauche. Or, ni l'une ni l'autre de ces deux affirmations ne me paraît suffisamment établies.  

 

 Il ne suffit pas de parler des dominés pour être de gauche. Tout dépend de la façon dont on les laisse formuler les effets de pouvoirs. La sociologie de Bourdieu, après un moment de description souvent remarquable, remplace la multiplicité des termes et des situations par un petit nombre de notions, toujours répétées, et qui décrivent les forces invisibles par lesquelles les acteurs n'ont pas conscience d'être manipulés. Or, il existe une différence essentielle entre les termes inventés par les personnes elles-mêmes pour définir ces forces invisibles et les «invisibles» révélés par le sociologue: les premières sont élaborées par les acteurs et ils peuvent «traiter» avec elles; les seconds, connus du seul sociologue, échappent aux personnes. Une fois que le discours dominant de la domination a passé, les personnes ordinaires ne sont-elles pas réduites, encore davantage, à l'impuissance? Peut-on nommer «de gauche» cette réduction des capacités de parole, d'invention et de résistance de ceux au nom desquels on prétend parler?   

 

Bourdieu a bien sûr une excellente raison pour définir, à la place des acteurs, les forces invisibles qui les manipulent : il fait oeuvre de science. De même qu'un biologiste a le droit de montrer qu'un patient est manipulé à son insu par l'action d'un virus, le sociologue a bien le droit de révéler les ressorts cachés de l'action, même si les acteurs n'en ont nulle conscience. Ce que nous acceptons du biologiste, sommes-nous prêts à l'accepter du sociologue? Si nous laissons le biologiste découvrir en nous des entités que nous ne voyons pas, nous exigeons de lui qu'il nous rende ces invisibles sous une forme modifiée et maîtrisée - par exemple, sous la forme de diagnostics, voire de vaccins. Or, il serait cruel de demander à Bourdieu qu'il nous montre ce qu'il a fait, dans son laboratoire, depuis trente-cinq ans, avec toutes ces forces invisibles qui nous tiennent pieds et poings liés. Les «champs» sont-ils devenus plus perméables? Le «capital symbolique» plus fluide? La «reproduction» moins répétitive?   

 

Du rêve de la science, Bourdieu a conservé le désir de maîtrise, mais il n'a gardé ni l'exigence de décrire le monde social dans les termes des acteurs, ni l'obligation de modifier les forces invisibles pour en limiter l'effet de domination. Pour faire oeuvre de science, il ne faut pas se contenter de dominer son objet, mais trouver les circonstances rares où l'objet échappe à la maîtrise en vous obligeant à lui poser ses propres questions. Les sciences «dures» sont souvent capables de produire artificiellement ces circonstances; la qualité des sciences «souples» se juge à leur habileté à modifier leurs questions et leurs explications en fonction des sujets et des lieux. La sempiternelle répétition des lois du monde social ne suffit donc pas pour faire de Bourdieu un savant sociologue.   

 

Si sa position demeure aussi fragile, comment peut-elle passer pour une théorie scientifique de gauche qui donnerait enfin la parole à ceux qui en furent si longtemps privés? Je ferai l'hypothèse suivante: l'intérêt soudain pour cette assimilation de la science, de la France et de la gauche autour du travail de Bourdieu a un avantage: elle permet de limiter à un tout petit nombre d'ingrédients connus les éléments dont se compose la vie sociale et politique. Grâce à la synthèse bourdieusienne, on connaît les composants essentiels de l'histoire: il n'y aura pas de surprise. En tout cas, on n'a pas à recomposer peu à peu, par l'enquête sociologique, par la vie politique, par l'exploration du marché, par l'expérimentation scientifique, ce que veulent, ce que sont et ce que peuvent les Français. On peut court-circuiter la vie politique, donner des leçons de morale aux pouvoirs et s'indigner à bon compte de leur manque d'audace. On sait : ils ne savent pas.   

 

Cette idée que l'on peut court-circuiter la vie publique parce que l'on posséderait une science qui donnerait des lois de l'histoire et qui permettrait de se situer à la gauche de la gauche a un précédent : le marxisme. Bourdieu n'a bien sûr rien d'un Lénine, mais il autorise les Français qui voient en lui une planche de salut à retarder la réflexion indispensable sur les liens entre la science, la France, la gauche, la modernisation, la société et l'économie. Comme si on pouvait simplifier le monde social et en connaître les composants sans se donner de moyens compliqués et coûteux pour donner la parole aux acteurs ordinaires et pour leur laisser déployer leurs propres mondes.   

 

Si l'on tient à renouveler la gauche, on ne le fera pas en rêvant à nouveau d'une science de la société après avoir rêvé d'une science de l'histoire, mais en décidant de traiter comme également réactionnaires les trois formes actuelles qui prétendent couper court à la vie politique : le premier mouvement, c'est le libéralisme à la française, qui veut réduire la complexité des organisations de marché à quelques lois d'airain d'économie américaine mal assimilée ; le deuxième, aussi dévastateur, réduit la France aux seuls Français «de souche» au nom d'un darwinisme aussi mal compris par les néofascistes que l'économie par les néolibéraux. L'irruption de la synthèse inspirée de Bourdieu a les mêmes traits réactionnaires : une science simplifiée, une réduction des composants du monde social.   

 

Ce troisième mouvement n'est pas plus surprenant, au fond, que le retour en grâce, dans les pays de l'Est, des communistes qui apparaissent, par rapport aux exigences nouvelles du monde, comme rassurants et confortables. «Ils sont sinistres, peut-être, mais avec eux, au moins, on sait où l'on en est et on évite à la fois le libéralisme et le fascisme.» Sur les deux mouvements auxquels il ressemble, le bourdieusisme a un avantage qui empêche de le prendre à la légère. Moins paré de scientificité que le premier, moins violent que le deuxième, il se prétend de gauche.   

 

Ne tombons pas dans le piège qui consiste à faire croire que critiquer le bourdieusisme reviendrait à embrasser le libéralisme. Si l'on souhaitait encore être de gauche, il faudrait s'opposer à tous ceux qui veulent faire fi des exigences de la vie publique au nom de sciences qui imiteraient la puissance des sciences naturelles sans en imiter les vertus: économie, eugénisme, sociologie. Peu importe, au fond, quelle est la science indiscutable qui fonde ces prétentions, du moment qu'elle est indiscutable: on ne peut pas être de gauche et croire qu'une science quelconque va nous épargner les tâches de la politique. Les crimes commis au nom d'une «politique enfin scientifique» sont trop frais pour qu'on en revienne déjà à ce travers - et la sociologie trop fragile pour qu'on lui délègue un tel pouvoir de simplification.

 

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Bruno Latour : "Il faut organiser le tâtonnement" / par  Nicolas Weill
-LE MONDE DES LIVRES | 27.04.06 | Mise en ligne le jeudi 27 avril 2006


Lecteurs, prenez garde à cet anthropologue sans frontières qui navigue entre la Californie, la Nouvelle-Angleterre et la France. Il est l’auteur d’une quinzaine d’ouvrages et animateur de deux expositions controversées en Allemagne aux titres cinglants : Iconoclash (2002) et Making Things Public (2005). Sa pensée n’est pas de celles qui confortent les certitudes. Elle précipite au contraire, avec bonheur, ceux qui l’abordent sur des étendues de plus en plus mouvantes. Son dernier livre en donne une nouvelle illustration : c’est à une véritable critique de la raison sociologique qu’il nous convie. Qui suit ce chemin s’expose à une révision profonde des fondements mêmes de la discipline.
Bruno Latour, Bourguignon né dans un milieu vinicole à Beaune (Côte-d’Or) en 1947, agrégé de philosophie et sociologue des sciences, s’apprête à rejoindre Sciences Po, après avoir enseigné de nombreuses années à l’Ecole des mines de Paris. Nul doute qu’il trouvera devant ce nouveau public l’occasion de pratiquer la provocation aimable et l’humour pince-sans-rire qui le caractérisent. La saveur spéciale de son style, plus familier au monde académique anglo-saxon qu’à l’Université française, où l’écriture savante affectionne plutôt le registre de la dramaturgie et de l’indignation, n’a sans doute pas peu contribué à faire proliférer sur sa route adversaires et sceptiques. Tout autant que la lecture très particulière qu’il a tirée de son observation des "sciences dures" et du laboratoire, par laquelle il montre l’importance de la rhétorique et des stratégies institutionnelles dans la fabrication des vérités scientifiques.

Pierre Bourdieu, dans l’un de ses derniers ouvrages, Science de la science et réflexivité (Raison d’agir, 2001), s’en inquiéta en lui consacrant quelques pages sévères. Pour le maître à penser de la "sociologie critique", Bruno Latour serait un "constructiviste radical", c’est-à-dire un penseur convaincu du caractère artificiel de la réalité. Autre péché, dont Bruno Latour se serait rendu coupable (et que ce dernier revendique) : avoir allégrement ignoré la frontière qui sépare philosophie et sciences sociales, tombant du même coup dans la "vulgate normalienne" haïe par l’auteur de La Misère du monde.

 

SOURIRE EN COIN

C’est aussi comme "constructiviste" que Bruno Latour fut fustigé, en compagnie d’autres intellectuels français comme Jacques Derrida, Julia Kristeva ou Jacques Lacan, par le physicien américain Alan Sokal, à l’occasion d’une mystification restée célèbre (Le Monde du 20 décembre 1996). En publiant dans une revue supposée "postmoderne" un article de physique volontairement truffé d’erreurs grossières, Sokal avait voulu dénoncer l’esbroufe d’une gauche intellectuelle censée avoir été convertie en masse au relativisme, voire à l’irrationalisme, et avoir rejeté comme "positiviste" l’idée même qu’il puisse exister un monde extérieur au discours...

Toutes ces attaques n’ont pas entamé le perpétuel sourire en coin de l’anthropologue. Pour Bruno Latour, quelque victime qu’il en ait été, "l’affaire Sokal" représente ce moment privilégié où des sujets observés - en l’occurrence des scientifiques - se sont pour la première fois révoltés contre les analyses de leurs observateurs sociologues, établissant ainsi que leur réflexion sur eux-mêmes n’avait pas rang inférieur par rapport à celle des spécialistes : "Il faut écouter les cris des gens qu’on explique", commente-t-il, amusé.

Au reproche de "constructivisme radical", Bruno Latour réplique aussi, indirectement, par son étonnante insistance à étendre les limites du "social" à ce qu’il nomme les "non-humains". Par là il entend non seulement les animaux mais aussi les plantes et les rochers, plaidant par plaisanterie pour un Sénat où seraient représentés les oiseaux migrateurs et les zones inondables ! C’est ce réalisme d’un genre très particulier qui l’amène à vouloir substituer à la notion d’"acteur" celle d’"actant". "C’est un honneur d’être une chose", affirme-t-il à la suite de la philosophe Isabelle Stengers, qui avec l’éditeur Philippe Pignarre, fondateur des Empêcheurs de penser en rond (aujourd’hui une collection du Seuil), et le sociologue Michel Callon, son confrère à l’Ecole des mines, fait partie de ses vieux complices.

Cette extension extrême du domaine de la sociologie ne risque-t-il pas d’empêtrer à nouveau ce savoir dans une conception "organiciste" d’une société conçue comme une fourmilière, quite à naturaliser les hiérarchies sociales ? "Je suis tombé dans la sociologie très tôt en apprenant celle des babouins, reconnaît Bruno Latour. C’est là que j’ai appris que la définition de l’organe est difficile à établir tout autant que celle du gène, ce qui m’a évité de sombrer dans le darwinisme social. Les grandes découvertes deviennent des épouvantails très largement à cause de l’épistémologie qu’on leur ajoute. Ce que fait Edward Wilson (professeur de zoologie à Harvard, fondateur de la sociobiologie) avec les fourmis est passionnant. Ce qu’il en tire avec la sociologie, c’est grotesque !"

Multiplier les incertitudes que ce soit sur les groupes, l’action, les faits, les objets ou l’expérience, contre la souveraineté d’une sociologie sûre d’elle-même, fût-elle assortie de l’adjectif "critique", tel est le projet de son ouvrage au titre en forme de programme : Changer de société, refaire de la sociologie (La Découverte, 402 p., 26 €). "Je considère l’épistémologie comme l’amiante. C’est un produit parfait dont on a floqué tous les bâtiments pour éviter les incendies et maintenant on s’aperçoit qu’il y a des maladies professionnelles", lance-t-il.

 

"COLLECTIF"

Bruno Latour pense en effet que l’erreur des sociologues, d’Auguste Comte à Bourdieu en passant par Durkheim, est d’avoir abordé les liens sociaux comme des entités déjà constituées, aussi fixes que les étoiles du ciel d’Aristote. Sous l’inspiration du fondateur américain de l’"ethnométhodologie", Harold Garfinkel, l’un des ancêtres des études de genres, mais surtout du philosophe, criminologue et sociologue français Gabriel Tarde (1843-1904), qui opposait son individualisme méthodologique au "tout social" de Durkheim, Bruno Latour estime qu’il faut abandonner non seulement la notion de "substance sociale" mais celle de société, qu’il suggère de remplacer par l’expression plus mobile de "collectif". "Est social pour moi ce qui est nouveau et quand on sent qu’il y a quelque chose qui ne colle pas. Il faut nommer "social" le moment où ça craque, où dans les associations on ne parvient plus à composer. On peut parler de lien social quand il est question de sa perte : les banlieues brûlent, le Gulf Stream refroidit, l’ours dévore des moutons qu’il ne devrait pas manger : ça, c’est du social !" Contre un savoir figé en idéologies il propose, en somme, de fluidifier la sociologie.

Le regard du spécialiste doit, selon lui, se déplacer jusqu’au niveau où les acteurs s’assemblent, c’est-à-dire en deçà de celui où se situent la traditionnelle "sociologie du social" et son exaspération en sociologie critique. "Comme le montre Zygmunt Bauman, l’invention de la notion de société se fait au XIX e siècle dans le but d’éviter la révolution." Il est inouï de penser que l’on étudie dans les départements de sociologie Marx, Weber, Durkheim comme des nouveautés. A l’en croire, les sciences sociales sont en danger de produire désormais des explications sorties toutes armées de l’ordinateur sur des faits qui n’existent pas. Il en veut pour exemple la prétendue agression par des prétendus beurs néonazis de la jeune mythomane Marie L. Toute fictive qu’elle ait été, elle n’en a pas moins déchaîné de savants développements sociologiques. La sociologie doit également être sensible aux circulations et intégrer l’événement comme la surprise. En cela Bruno Latour est proche de la "sociologie du risque" de l’Allemand Ulrich Beck édifiée en réaction à divers incidents ébranlant les certitudes d’un âge industriel révolu (les catastrophes de Bhopal ou de Tchernobyl), même si le Français préfère qualifier sa propre théorie de "sociologie de l’acteur-réseau" (Actor Network Theory, soit le sigle ANT, mot qui en anglais signifie "fourmi").

C’est toujours en ethnographe soucieux d’abord de bien décrire que, dans ses travaux plus récents, Bruno Latour s’est penché sur la vie politique et ce qu’il a appelé, au terme d’une enquête sur le Conseil d’Etat menée dans les années 1990, "la fabrique du droit". Il se revendique pour cela du pragmatisme de l’Américain John Dewey (1859-1952), qu’il a contribué à faire découvrir et traduire. "Contrairement à la tradition d’ingénierie sociale plutôt européenne, de sciences camérales au service de l’Etat, commente-t-il, l’idée de Dewey est que les politiques sont aveugles, les sciences sociales aussi et que les conséquences de nos actions sont inattendues. Aveugle pour aveugle, la question est celle des instruments de tâtonnement commun. Ce sont ces cannes blanches qui définissent le politique. On est dans une situation où il faut organiser le tâtonnement, loin du rationalisme guidant le progrès et la République. Les pragmatiques n’en étaient pas moins des démocrates et pas du tout des réactionnaires à l’ancienne."

D’où le côté déroutant d’une oeuvre et de références qui se veulent également une réhabilitation en règle du relativisme comme la seule attitude scientifique, au moins comme prise au sérieux de la multiplicité des points de vue. "Considérer le relativisme comme une injure est inouï quand on pense à l’éloge continu que l’on fait d’Einstein et de la relativité, s’insurge Bruno Latour. Le fait qu’en morale ou en droit le relativisme est une vertu appréciée rend d’autant plus étrange que le malaise s’installe dès qu’on prononce le mot. C’est la peur du relativisme qui est cause que l’on s’accroche à cette catégorie toute faite que l’on appelle le social." Si le relativisme veut dire établir de la distance, alors pour lui le relativisme reste bien son drapeau.

 

Bouleverser les habitudes

A la différence de ceux que les Américains identifient collectivement sous le vocable de "French theory" - les Derrida, Lacan, Foucault -, les intellectuels français qui appartiennent à la génération suivante, contemporaine de Bruno Latour, n’ont pas encore reçu de "label", ni en France ni à l’étranger. Quoique fort hétérogènes, les travaux du sociologue Luc Boltanski, de l’ethnologue Philippe Descola, du biologiste et philosophe Henri Atlan ou de Bruno Latour lui-même ont pourtant ceci de commun qu’ils s’efforcent, chacun à leur manière, de bouleverser les habitudes acquises des sciences humaines. La diversité des sujets abordés par ce dernier depuis la parution de son premier ouvrages, La Vie de laboratoire (La Découverte, 1979) en est peut-être aussi responsable. Parmi ses principaux essais, on retiendra Nous n’avons jamais été modernes. Essai d’anthropologie symétrique (La Découverte, 1991), Aramis ou l’amour des techniques (La Découverte, 1992), Petites leçons de philosophie des sciences (Seuil, 1996), Petite réflexion sur le culte moderne des dieux Faitiche (Les Empêcheurs de penser en rond, 1996), Jubiler ou les difficultés de l’énonciation religieuse (Les Empêcheurs, 2002) et La Fabrique du droit. Une ethnographie du Conseil d’Etat (La Découverte, 2002).
http://fr.search.yahoo.com/search?p=bruno+latour+action&ei=UTF-8&rd=r2&fr=yfp-t-501&pstart=1&b=11

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故 라비카 3 [토젤(A.Tosel) 추도문]

지지난 달(2009/02/12)에 조저 라비카(Georges Labica,1930~2009)가 세상을 떠났다는 소식이 있었다(참고: [속보] 라비카(G.Labica) 타계| 정치철학1 http://blog.jinbo.net/radix/?pid=86). 다른 걸 검색 중 우연히 앙드레 토젤(André
Tosel)이 쓴 추도문을 발견했다. 제목은 이렇다: "조저 라비카의 맑시스트적 집념이 주는 교훈". 역시나 프랑스 최고의 공산주의자(내가 보기에, 학자 중에서)인 토젤 할아버지(연보가 안 나오는데, 아마도 마셔레보다 한 살 정도 많은 37년생?)가 또 다른 프랑스 맑시즘의 큰 기둥이었던 선배에게 바치는 글이 제목부터 간절하다. 그리고 토젤은 추도문의 시작을 라비카의 말로 시작한다: "그래, 이제 노동자 계급은 더 이상 존재하지 않는다. 행여 존재한다면, 모두가 주둥이로만 하는 노동자 계급이다." "공산주의(*), 그것은 '전혀 인간의 얼굴을 갖지 않는 자본주의 착취사회'에 대항하는 유일한 항생제이고, 유일한 해독제이고, 유일한 치료제이고, 유일한 대안이다. 자본의 땅에서 고통받는 모든 이들은 이 사실을 알지만, 그들의 수는 점점 더 늘어나고 그들은 점점 더 고통받는다. 자본가 개새끼들(더러운놈들-Salauds-쌀로)은 그들의 곁에 없다. 그리고 세상은 늘 그렇게 흘러간다는 것을 우리는 저 '쌀로'들을 통해서 안다."(라비카, <민주주의와 혁명>, ed. 버찌의 시대, 2002, pp.66 & 112)

 

Théorie de la violenceDémocratie et révolution

Georges Labica, Démocratie et révolution, Le Temps des cerises, oct. 2003, 202 p. [non dispo.]

Georges Labica, Théorie de la violence, Vrin, déc. 2007, 22 euros.

 

(*) 내가 알기로, 프랑스 맑시스트 대가 중에서, 맑시즘이니 사회주의니 공동체니 등으로 애두르지 않고 대놓고 바로 '공산주의'(communisme)를 말하는 자신감 있는 맑시스트는 이 두 사람 뿐이다. 마셔레도 발리바르도 랑시에르도(바디우가 사용하는 '혁명'은 사기다) -내가 느끼기에- '공산주의'라는 용어를 자신있게 사용하지는 않는다(못한다).

 


[출처] http://semimarx.free.fr/IMG/pdf/AT_Hommage-Labica.pdf 문서의 HTML 버전입니다.

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http://209.85.229.132/search?q=cache:mQs47WYq8vgJ:semimarx.free.fr/IMG/pdf/AT_Hommage-Labica.pdf+democratie+revolution+texier&cd=35&hl=ko&ct=clnk&gl=fr

PDF 판은 막혀있고 html 버전에서 퍼오다보니 단어들이 많이 붙어있다. 읽어가면서 수작업을 해야겠음.

 


La leçon de maintien marxiste de Georges Labica

par André Tosel


« La classe ouvrière n’existe plus. Mais elle prend tout sur la gueule »« Le communisme c’est le seul contrepoison le seul antidote le seul remède la seule alternative à la société d’exploitation au capitalisme qui jamais n’a le visage humain.Tous les damnés de la terre savent ça qui sont de plus en plus nombreux et deplus en plus damnés. Seuls les salauds ne sont pas avec eux et c’est comme ça qu’on les reconnaît. » Ces aphorismes tirés d’un de ses derniers ouvrages Démocratie et révolution (Le Temps des cerises, 2002, p. 66 & 112) donnent le ton de la voix singulière de celui qui vient de nous quitter et qui demeure la figure d’un des rares intellectuels marxistes et communistes qui en France ont su sans se renier maintenir le cap au sein de la tempête déchainée par le capitalisme mondialisé. Georges Labica, c’est d’abord cette voix qui ne cesse jamais de rappeler à la pensée, à la philosophie en particulier son appartenance au monde, l’état de ce monde et la condition de privation d’humanité en laquelle est jetée la masse des hommes vivant en ce monde ; c’est le chercheur d’une autre voie pour un communisme de ce monde et de ce temps. Tel est le fil conducteur d’une œuvre considérable : une quinzaine de livres, une quinzaine de directions d’ouvrages et je ne sais combien d’articles et contributions diverses à des colloques et à des revues tant sur le plan national qu’international. Il faudra un jour procéder à l’étude de toute cette profusion.

Formé à l’étude de Marx à la fois par la lecture d’Henri Lefevbre et de Louis Althusser – qu’il se garda d’opposer l’un à l’autre -, Labica ne céda jamais sur l’apport irréductible de Marx, et sur celui des marxistes critiques et révolutionnaires, l’un n’allant pas sans l’autre. Pour lui, la nécessaire réévaluation critique de Lénine, de Mao et de Castro ne signifia jamais simplement abandon et retour au bercail d’un social-libéralisme rajeuni dans le bain de la jouvence communicationnelle ou détrempé dans les saintes huiles d’une civilité de substitution.Cette prise de parti pour la critique marxiennne de la société capitaliste est unie originairement à l’analyse de notre monde depuis la perspective d’un militantisme anti-colonialiste et anti-impérialiste qu’il actualisa très tôt durant la guerre d’Algérie et ses séjours en ce pays où il rencontra sa femme Nadya. On oublie trop que Georges Labica a commencé sa vie de chercheur en étudiant des penseurs arabes anciens en quête d’une vision rationaliste de l’histoire et de la philosophie comme Ibn Kaldhoun (La Mukkadima, le rationalisme d’Ibn Kaldoun et Politique et religion chez Ibn Kaldoun, Alger, 1966) et Ibn Tufail (Ibn Tufaille philosohe sans maître, Alger, 1969). La classe ouvrière est immédiatement saisie en la multiplicité de ses formes et jamais séparéedes peuples opprimés. Marx alors réactualisé par l’intervention décisive de Louis Althusser donna à cette prise de parti éthique et politique sa base théorique et obligera Labica à une explication avec la philosophie qui guidera toute son œuvre à venir.

 

Dans sa thèse de doctorat dephilosophie qui lui valut d’être nommé tôt maitre-assistant puis professeur à l’université de Paris-X-Nanterre, Labica s’interroge sur La statut marxiste de la philosophie (Complexe-PUF, 1977). Il étudie la sortie de la philosophie à laquelle procède le jeune Marx de 1841 à 1848, à la rupture ou coupure épistémologique que théorise alors Althusser. Marx ne cherche pas à élaborer une autre philosophie qui serait l’unité du matérialisme historique ou science des lois objectives de l’histoire et du matérialisme dialectique défini comme conception générale des lois de la pensée, de la nature et de l’histoire. D’entrée de jeu est récusée la synthèse impossible qui fut défendue par le marxisme-léninisme soviétique qui devint vérité officielle, une vulgate diffusée largement parle Parti communiste français en ses écoles.

Cette critique fut reprise et développée dans Le marxisme-léninisme, éléments pour une critique (Éd. B. Huisman, 1984). Elle est à la base de la polémique permanente que Labica entretînt avec Lucien Sève qui tentait alors de donner une version acceptable d’une philosophie marxiste matérialiste et dialectique. Pour Labica la philosophie est tentée perpétuellement de se constituer en mode de représentation autonome, fin en soi, et d’oublier son appartenance au monde historique des luttes et des conflits. La philosophie ou bien dénie ce lien ou bien procède à une apologie indirecte ou non de l’état actuel du monde au profit de la domination. Elle se fait idéologie du théorique. Il n’est pas tant de philosophie marxiste que de pratique et de statut marxistes de la philosophie. Celle-ci est invitée à procéder à la critique permanente de son devenir idéologie d’État ou de parti. Cette pratique élabore une position permettant de défendre et d’élargir le savoir del’histoire se faisant, et cela dans un sens non-économiciste et résolument ouvert sur une relance politique et idéologique des luttes declasse et des masses subalternes. Cette interprétation politico-polémique de la philosophie explique aussi pourquoi Labica ne se rapprocha pas de Gramsci qu’il connaissait bien mais dont il redoutait l’interprétation social-libérale alors donnée par les intellectuels dominants du Parti Communiste Italien. Il préféra le communisme critique d’Antonio Labriola à une philosophie de la praxis qui risquait de porter à l’absolu l’idée de conception du monde. C’est ainsi qu’il organisa le premier colloque consacré au penseur italien Labriola. D’un siècle à l’autre en 1985 (actes publiés chez Méridiens-Klinksieck en 1988).Ces positions furent réassurées à la même époque par la remarquable étude de 1987 aussi consacrée à Karl Marx : Les Thèses sur Feuerbach (PUF). Labica espéra longtemps que le PCFdans les rangs duquel il milita à la base jusqu’à la fin des années 1970 et début des années 1980 fût capable de se réformer et d’abandonner le poids du stalinisme sans sortir de sacrise par une voie social-réformiste, sans s’aligner sur le fétichisme d’une démocratie représentative pure. Comme Althusser, il croyait en la nécessité d’une sortie de gauche du stalinisme et c’est dans cet esprit qu’il participa aux événements de 1968 et renforça son lien avec les luttes anti-impérialistes, en syntonie avec Samir Amin et d’autres intellectuels militants du Tiers-Monde qu’il ne cessa jamais defréquenter en quête d’un nouvel internationalisme. Il quitta le PCF après avoir plusieurs fois tiré le signal d’alarme avec d’autres sur les ambiguités de la politique du programme commun (notamment avec E.Balibar, G. Bois et J.-P. Lefebvre dans Ouvrons la fenêtre, camarades ! en1979 (Maspéro). Il poursuivit cependant son activité politique dans divers cercles de réflexion et d’initiatives autour des revues comme Critique communiste, Utopie critique ou les éditions Le Temps des cerises. Enfait, il consacra surtout la plus grande partie de son énergie à rassembler les voix les plus diverses des marxismes devenus éléments actifs de la culture durant la période 1961-1980. Il se révéla ainsi un grand organisateur de culture théorique et politique.

 

Il dirigera à l’université de Nanterre jusqu’à son départ à la retraite un centre de recherche(CNRS) – alors unique en son genre – de philosophie politique, économique et sociale (on notera le lien entre ces disciplines). Ce Centre organisa de nombreux colloques et fut marqué par un réel libéralisme intellectuel. Ferme en ses convictions théoriques et politiques, Labica montra une remarquable ouverture d’esprit en accueillant toutes les orientations de la pensée critique, en espérant œuvrer à la relance d’une nouvelle théorie critique articulée sur Marx et les classiques, mais ouverte sans sectarisme. Il aida de nombreux chercheurs à se faire connaître et à travailler. C’est au sein de cette équipe que se forma initialement avant de s’autonomiser la revue Actuel Marx dirigée par Jacques Bidet et pour un temps aussi par JacquesTexier. Cette revue poursuit encore ce travail de refondation théorique et politique. Le cœur de cette tentative d’élaboration d’un marxisme(auto)critique aboutit en 1982 à l’élaboration et à la publication du Dictionnaire critique du marxisme, en codirection avec Gérard Bensussan, aux PUF, traduit en plusieurs langues et plusieurs fois réédité, disponible en version économique (PUF, « Quadrige »). Cet ouvrage encore indispensable a réuni une centaine de collaborateurs divers et permis defaire le point non seulement sur les concepts principaux élaborés par Marx et les meilleurs des marxistes, mais aussi de réhabiliter des figures passées sous silence par l’orthodoxie stalinienne. Cet ouvrage marque un tournant tout comme il est pris dans un paradoxe ironique. Il constitue un tournant parce qu’il permet un bilan de ce qu’a été la recherche marxiste en France quand on espérait qu’après 1968 une nouvelle voie révolutionnaire ou puissamment réformatrice s’ouvrît.
Mais ce tournant s’est inversé en se faisant paradoxe parce qu’en France commençait alors la contre-révolution libérale, masquée d’abord par le réformisme sans réformes de Mitterrand et du Parti socialiste, accompagnée par la furieuse campagne antitotalitaire qui réunit les forces libérales pro-capitalistes et une gauche dite « moderne ». Le mouvement post-moderne emporta alors le marxisme en même temps que s’épuisait définitivement le communisme soviétique. Beaucoup de marxistes opérèrent un virage théorique social-libéral plus ou moins social au profit d’une démocratie citoyenne aussi bavarde qu’impuissante devant la montée des racismes et des ethnicismes, la liquidation du Welfare State, la contre-révolution initiée par un capitalisme mondialisé désormais sans adversaires. L’entreprise de Labica fut prise à contre-pied : parti pour une offensive théorique et politique de renouvellement du marxisme et du communisme, Labica se trouva affronté à la tâche ingrate et difficile d’organiser une retraite stratégique pour éviter la désagrégation totale des forces decontestation inspirées du marxisme communiste. Il manifesta là une fermeté d’âme réellement stoïcienne et refusa de se coucher. Il continua sa réflexion en saisissant la nouveauté d’un capitalisme mondialisé impitoyable et en alertant sur sa puissance de destruction. C’est cette résistance têtue, cette leçon de maintien militant qui s’exprime en particulier dans les deux derniers ouvrages qu’il publia, le recueil d’articles qu’est Démocratie et révolution (Le Temps des Cerises, 2002) et l’étude systématique Théorie de la violence (Città-del-Sole &Vrin, 2007).Ces deux ouvrages sont en quelque sorte le testament qu’il nous livre.Labica qui a toujours pris Lénine au sérieux n’a jamais été antidémocratique. Il pense seulement que l’actuelle démocratie est une oligarchie laissant les mains libres aux forces politiques et économiques dominantes et que seule peut renouveler la relance d’une révolution instruite inversement des dégâts provoqués par le déficit démocratique de l’expérience soviétique. Pas de démocratie sans révolution, mais pas de révolution sans une démocratie de masse. Du même coup, il faut revenir sur la question de la violence. S’il est vrai que trop souvent la contre-violence légitime des classes et peuples exploités n’a pu éviter un excès de violence incontrôlable et injustifiable, il ne faut pas oublier inversement la violence inouïe et infiniment supérieure du système capitaliste qui va jusqu’à la limite de l’intolérable. C’est ce rappel salutaire que lançait déjà la belle étude de 1990 Robespierre, une politique de la philosophie (PUF, « Philosophies ») qui fait plus et autre chose que réhabiliter la figure du révolutionnaire en découvrant le philosophe d’un droit naturel radical, proche en cela d’Ernst Bloch, un auteur particulièrement aimé de Labica.

 

Georges Labica est un penseur et un militant animé de la passion politique la plus intègre et la plus intégrale. Il a cherché en quelque sorte à donner au marxisme et à sa politique du peuple ce que Machiavel et Lénine ont donné à la politique, sa philosophie immanente. Certains ont fait valoir que sa critique de la philosophie se fut développée dans une certaine indifférence aux moments forts de la recherche philosophique du siècle passé, avec un scepticisme relatif face aux constructions théoriques, loin d’une construction philosophique systématique. C’est une question à débattre en prenant en compte les éléments les plus significatifs de la pensée en France et à l’étranger qui ont été passés sous silence. Labica n’a pas produit une philosophie au sens de Sartre, de Merleau-Ponty, de Badiou, de Deleuze, de Derrida,de Balibar, de Nancy, de Castoriadis, de Foucault. Il n’a pas élaboré de théorie au sens de Bourdieu, d’Habermas, de Bidet, alors que souvent il exerce une fonction de rappel salutaire sur certains oublis ou autres dérives. Face à tous ceux qui à juste titre disent que tout n’est pas dans Marx, Georges Labica rappelle inlassablement à tout aussi juste titre que rien ne peut se faire sans Marx, sans un renouveau de la critique de la société-civile capitaliste mondialisée. Ce qui est une idée toujours vraie, encore plus vraie. Labica se méfie des bricolages philosophique séclectiques, des synthèse prématurées qui veulent boucher les trous par où le réel nous blesse et nous défie. Allons plus loin. Labica n’est pas aussi antiphilosophe qu’il le donne polémiquement à croire. Il a toujours manifesté un respect théorique et politique pour l’œuvre d’Henri Lefebvre qu’il a contribuée à réhabiliter et à rééditer, notamment en introduisant une nouvelle édition de la Métaphilosophie de ce dernier. N’est-ce pas là qu’il faudrait chercher ce qui fut la philosophie de Labica, une philosophie ouverte sur la transformation des champs épistémiques et des camps politiques ? L’étude sérieuse des manuscrits encore inédits peut réserver des surprises. Souhaitons-en une mise en route rapide. En tout cas, un grand merci, Georges, pour ta tenue théorique et politique en ces temps difficiles ! (André Tosel)

 

[대충번역,빨간강조] "혁명 없이 민주주의 없고, 대중의 민주주의 없이 혁명 없다." 70, 80년대에 수많은 맑스주의자들이 "현대적"이라는 이름으로 "난폭한(미친-furieuse) 반 전체주의 캠페인(*)"에 나서며 자유주의적 친 자본주의에 편승할 때, 수많은 맑스주의자들이 범 세계적 자본주의에 의해 견인된 "반 혁명론"의 노도 앞에서 무능하고 입만 산 "시민적 민주주의"를 외치며 자유주의적 사회이론으로 선회할 때에도, 라비카는 이러한 세파에 굴복않은 흔들림 없는 공산주의에 대한 신념으로 무장한 전사였다. 그의 이러한 끈질긴 저항의 흔적은 특히 마지막 두 저작인 <민주주의와 혁명>(2002), <폭력론>(2007)[<로베스삐에르, 철학의 어떤 정치>(1990)의 연장]에 올곧게 녹아서 그가 우리에게 남긴 일종의 유언으로 되살아 난다.

(*) 일례로, 직전 포스트 (민주주의(고대에서...))에서 '민주주의에 대한 사상가들' 항목의 마지막 주자인 러포르(Claude Lefort (1924~))의 경우만 봐도 토젤이 비판하는 70,80년대적 흐름을 쉽게 짐작할 수 있다: "러포르가 수행한 70,80년대의 민주주의에 대한 연구는 전체주의와의 관계 속에서 이뤄진다(특히, <민주주의의 발명. 전체주의적 지배의 한계>(1981)를 보라)... [ La réflexion sur la démocratie poursuivie par C. Lefort dans les années 70 et 80 porte sur ses conditions d'émergence et ses rapports avec le totalitarisme (voir notamment L'Invention démocratique. Les limites de la domination totalitaire, Fayard, 1981)...]"

전체주의가 옳다는 것이 아니라, 민주주의 사상이 어느 정도는 품고 다닐 수밖에 없는 전체주의적 요소들을 꼭 역사적 전체주의적 양상들과 엮으면서 이뤄지는 비판의 끝이 결국은 자유주의적 친 자본주의의 유혹으로 연결된다 것에 대한 경계일 것이다. 전체주의가 무조건 나쁜 것이 되기에는 인류학적, 사회-경제적 객관적 환경이 전체주의보다도 더 나쁘게 규정돼 있다는 실재적 사실도 함께 고려해야한다는 말씀이겠다. 그리고, 전체주의가 갖는 폭력적 면모들(강제, 의무..)이 나중에는 '비폭력'과 '반혁명'에 대한 선호로 이어져, 유순하고 평화로운 '시민적 민주주의'라는 말로만 가능한(최소한 자본주의의 괴력과 숨은 폭력 치하에서는) 이론을 주창하는 경향들이 있는데, 이런 비겁하고 게으른 행태들에 대한 저항으로 -아마도- 라비카는 죽기 불과 1년 2개월 전에 '폭력에 대한 변명'으로 <폭력론>을 마지막으로 저술했는지도 모르겠다. [아래는 토젤의 책 2권. 하나는 작년 11월 간]

 

Études sur Marx (et Engels)Un monde en abîme ? : Essai sur la mondialisation capitaliste


André Tosel, Études sur Marx (et Engels), Kimé, nov. 1998, 145 p. [occasion à partir de EUR 161,01]
André Tosel, Un monde en abîme ? : Essai sur la mondialisation capitaliste, Kimé, nov. 2008, 345 p., 29 euros.

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